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Cette attaque du 23 juin alarme le Ministre de la Guerre qui, le 24, à douze heures, téléphone : « Le Ministre fait dire au général Joffre que, de l’avis unanime, il ne faut à aucun prix, pour aucune considération, assumer la responsabilité d’un retard dans l’attaque franco-anglaise. »

On arrive à la période de tension extrême.

Le 27 juin, le général Joffre donne à Verdun la suprême consigne :

Je tiens à vous spécifier que vous devez continuer une résistance opiniâtre sur la rive droite de la Meuse sans vous laisser influencer par le risque de perdre éventuellement du matériel. Aucune appréhension de cette nature ne doit affaiblir la résistance ni enrayer l’exécution des actions contre-offensives prévues.

Joffre sait à qui il adresse cette objurgation. Tandis que les appels retentissent autour de lui, son principal souci et son principal réconfort sont dans l’action qu’il a préparée de longue main et qu’il déclenchera dès qu’il aura réuni autour d’elle toutes les chances. Comme Turenne il veut soustraire à la fortune tout ce que l’on peut lui enlever.

Le général Foch qu’il a amené sur la Somme, prépare l’offensive franco-britannique avec la collaboration inlassable du Grand Quartier Général. 44 divisions d’infanterie participeront à cette offensive de la Somme, 20 y participeront deux fois, 6 y participeront trois fois. Ce formidable effort de l’armée française sera le résultat direct de la persévérance et de la ténacité du général en chef.

Le 26 juin, comme à la veille de la Marne, le général en chef écrit au gouvernement une lettre pour lui exposer la situation militaire et l’action du commandement pendant l’année 1916. Elle est à citer tout entière :

Au moment où commence l’offensive franco-anglaise, sur la Somme, je crois devoir vous exposer la situation militaire générale, telle qu’elle résulte des opérations qui se sont développées depuis le début de l’année 1916, tant sur le front occidental que sur le front des armées russes en Europe.

Ainsi que vous le savez, le plan d’opérations des Alliés pour 1916 comportait essentiellement une offensive générale qui devait être entreprise à l’époque de l’année où les armées russes et anglaises auraient reçu les compléments indispensables en hommes, en matériel et en munitions.