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techniques dont nous aurons à faire l’application fréquente, qu’un puits est enveloppé souterrainement d’une ceinture étanche en bois ou en fonte, appelée son « cuvelage » et assimilable au tunnel du Nord-Sud placé verticalement, avec même rôle de protection contre l’infiltration des eaux. Au jour, l’orifice du puits est surmonté d’un « chevalement » en fer, en bois, en béton armé, petite tour Eiffel avec de grandes bobines, sur lesquelles passent les câbles d’extraction, portant les cages d’ascenseurs, et tirés par une puissante machine. Ces deux engins, le chevalement et le cuvelage, sont particulièrement importants et délicats. Le cuvelage est l’unique protection du puits et de la mine contre l’envahissement des eaux qui, dans les mines du Nord et du Pas-de-Calais, tourne vite au désastre.

Cette question des eaux est le point tout à fait essentiel de la reconstitution minière, sur lequel je me propose d’insister en parlant de Lens, mais dont il faut signaler aussitôt le principe. On ne doit pas oublier qu’un vide quelconque dans l’intérieur du sol tend rapidement à être envahi par les eaux, ou profondes ou superficielles. Il crée un champ de drainage et comme un réservoir pour tout ce que le sol fissuré ou percé peut contenir ou absorber d’eau au-dessus. Un vide souterrain sans eau est, si cela ne tient pas à ce qu’on l’épuise incessamment, un phénomène très exceptionnel. Dans le Nord, cet envahissement des eaux se trouve porté à son paroxysme par la présence, sur le terrain houiller, d’un manteau crétacé à nombreuses fissures aquifères, atteignant, suivant les endroits, 100 à 200 mètres d’épaisseur. Il en résulte que, lorsqu’on fonce un puits à traversées « morts-terrains » de la craie, perméables comme une éponge, on ne peut se borner à épuiser au moyen de pompes même très puissantes ; il faut, pour traverser ce véritable torrent, parfois animé d’un courant rapide, employer des procédés compliqués et difficiles, sur lesquels j’aurai à revenir avec quelques détails et qui consistent dans la congélation ou le cimentage des terrains aquifères. En deux mots, par un cercle de sondages verticaux enveloppant le puits, on injecte, soit un mélange réfrigérant, soit du ciment ; on transforme ainsi la zone encaissante en un bloc momentanément ou définitivement consolidé, dans lequel on devient ensuite libre de foncer. Le puits, une fois creusé grâce à ces artifices, est, au fur et à mesure, revêtu d’un cuvelage étanche en bois ou en fonte, exceptionnellement en béton