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Cabriolets et carrioles
S’en vont vers les marchés prochains ;
Les chapeaux noirs des maraîchins
Glissent, au mouvement des yoles

Après quoi, la triste saison
Répand sa teinte vespérale ;
Le clocher de la cathédrale
Se renfonce dans l’horizon,
Et bientôt se ferme la voûte
D’où tombent les vols hésitants,
L’eau, le silence et — goutte à goutte
Le long suintement du temps…


LA « GRÉGOIRIÈRE »


Aux confins du raz et de la presqu’île,
Dans le ciel fuyant, la ferme défile
Ses murs bas et blancs ;
Tout autour, s’étend le damier tranquille
Des marais salants.
 
C’est ici la fin de la terre ferme ;
L’horizon se tend que le soleil ferme
De son paie sceau…
L’on cherche de loin si c’est une ferme
Ou bien un vaisseau.

Qui peut habiter ce morne royaume ?
Aucune étincelle au-dessus du chaume,
Sous le seuil, nul rais ;
L’hôte n’est-il pas un sorcier, un gnome,
Ou Gilles de Retz ?

Pourtant, lorsqu’on passe, à travers la brèche,
On voit dans la cour du linge qui sèche,
Un soc, un vieux break ;
Et, près du pailler, monte l’odeur fraîche
D’un tas de varech.