Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 59.djvu/324

Cette page a été validée par deux contributeurs.

À plus forte raison prenons-nous, maintenant que nous avons retrouvé la libre disposition de nos forces, les mesures nécessaires pour répondre au grand honneur qu’on nous fait en nous choisissant pour maîtres. Nous avons compris qu’il ne s’agissait pas seulement d’affirmer notre bonne volonté, mais de la rendre efficace ; qu’il n’est point de clientèle si bien disposée qui se contente de sourires engageants, sans profits. Nous nous sommes mis à l’œuvre, de notre mieux. De 1914 à 1919, l’Alliance française n’avait jamais cessé ses cours, bien qu’elle fût occupée par ailleurs du soin de la propagande : à présent, elle les a réorganisés. Nos universités comptaient 1 885 étudiants étrangers en 1915, 1 943 en 1916, 2 399 en 1917, 3 238 en 1918 : à présent, elles offrent des cours nouveaux, refondent leurs programmes, assurent leur recrutement par les méthodes les plus modernes. Cette vaillante Université de Grenoble, qui la première a su attirer et garder les étudiants étrangers désireux d’apprendre le français, — un seul en 1897, 1 511 en 1913, — les voit de nouveau arriver de tous les points du monde. Cette glorieuse Université de Strasbourg, que la violence nous avait ravie, travaille maintenant avec ses sœurs pour le bon renom de la France ; elle vient de présenter aux étrangers, pour la saison prochaine, un plan d’études supérieur à tous ceux que les Universités allemandes ont jamais pu leur offrir. Mais je devrais les citer toutes. Il faut qu’il disparaisse, le type de l’étudiant étranger que tels Français d’autrefois, casaniers et peu soucieux d’être dérangés dans leurs habitudes, considéraient sans indulgence, pour cette première et très simple raison, que d’abord, il ne savait pas le français. Il attrapait, s’il le pouvait, quelques bribes de cours ; il se hasardait dans les régions périlleuses de nos bibliothèques, bien défendues par leurs gardiens contre ceux qui voulaient lire ; et après avoir subi les dédains des garçons de salle, il quittait pour toujours ces lieux inhospitaliers. C’était décidément dans les cafés du quartier latin qu’il poursuivait son apprentissage du français. Nous voulons qu’il n’en soit plus ainsi. Nous savons ce dont il a besoin ; nous savons que, l’homme ne vivant pas exclusivement de science, il faut aider l’étudiant dans les difficultés matérielles d’une vie toute nouvelle pour lui, et où il risque de s’égarer à chaque pas. La science elle-même, il faut la lui doser. Une organisation nouvelle des cours qui lui sont réservés, et notamment la division en semestres, chère aux habitudes étrangères ;