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Il n’est pas défendu de penser que si le plan français avait été exécuté avec une fermeté résolue, en particulier par notre armée de gauche, la plus importante, nous aurions gravement compromis le développement si risqué de la manœuvre enveloppante de l’aile droite allemande, comme nous l’avons brisée définitivement en Lorraine et dans les Vosges. La 5e armée à l’échec de laquelle est lié l’échec définitif du plan 17, a été la seule qui ne se soit pas entièrement conformée à l’esprit de ce plan puisqu’il y avait comme un doute dans l’esprit de son commandement et qu’au lieu de se porter offensivement au Nord de la Sambre, elle a attendu passivement et à distance de la rivière le choc des armées allemandes ; et elle a reculé ensuite, alors que deux de ses corps seulement avaient été sérieusement engagés.

Il a, d’ailleurs, été surabondamment démontré que cette première période offensive n’a pas été sans obtenir certains résultats. Ceux qui ont vu nos cinq armées reculer après la bataille des Frontières se sont rendu compte que, malgré les circonstances si douloureuses, elles devaient, précisément à leur première attaque, d’avoir acquis suffisamment de cohésion et de sang-froid pour accomplir d’abord une retraite vigoureuse et pour réaliser ensuite le « redressement. »


Une autre critique portée contre le plan 17 a été d’avoir accumulé trop de forces à droite et de n’avoir pas suffisamment étendu la gauche française en vue de parer au mouvement tournant des 1re et 2e armées allemandes à travers la Belgique. Si ce plan avait été aussi vigoureusement exécuté qu’il était, stratégiquement, solidement conçu, si les deux armées du centre (3e et 4e armées) avaient pu réaliser en temps utile, c’est-à-dire dès le 13 ou le 14 août, leur manœuvre offensive, elles auraient probablement progressé sans difficultés à travers les massifs forestiers des Ardennes, et auraient placé le gros des armées allemandes et l’aile droite allemande dans une situation qui pouvait devenir des plus périlleuses.

Quoi qu’il en soit, le reproche, en tant qu’il vise les dispositions stratégiques, n’a pu s’accréditer que par une méconnaissance profonde des réalités. Les publications officielles allemandes établissent désormais que, conformément aux idées de Schlieffen, lu manœuvre de l’aile droite allemande se doublait à