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grande joie, car il porte dans le cœur une très vive sympathie pour son sujet, si l’histoire de l’Etat était en même temps celle de la race. Le développement historique de l’Allemagne en a décidé autrement. Si nous considérons la Bavière, nous rencontrons dans l’Ouest et le Nord des territoires souabes et franconiens qu’elle a attirés à elle, mais qui n’entrent que très tard dans le cercle de nos recherches. En revanche, au Sud et à l’Est, il y a des populations de race bavaroise qui se sont détachées à une époque reculée de la mère-patrie. Elles se sont séparées d’elle de bonne heure, mais pourtant pas avant le cours du XIIe siècle, et peu à peu. Jusque-là, c’est-à-dire pendant près de sept cents ans de son histoire, le peuple bavarois, unifié dans sa langue, son droit et ses coutumes, sauf pour la Carinthie, a formé politiquement un tout, résistant à l’émiettement plus longtemps que les autres peuples germaniques. »

Ces lignes font apparaître un évident regret et dessinent un programme. D’autre part, le professeur Fester, qui enseigne à Erlangen, mais n’est pas originaire du royaume, se fait l’écho en 1899 des revendications nationales[1]quand il constate que la dynastie des Wittelsbach ne règne pas sur toutes les populations qui sont de race bavaroise. Enfin, Franziss s’exprime avec netteté : « La race bavaroise, écrit-il[2], embrasse actuellement 11 millions d’hommes environ, et elle est établie dans tout le bassin du Danube. Il n’y en a qu’une faible partie qui vive dans le royaume, en Haute et Basse-Bavière, dans le Haut-Palatinat et le Sud de la Franconie moyenne. Le plus grand nombre, au cours des siècles, s’est séparé de la mère-patrie. Les habitants allemands des deux Autriches, au-dessus et en dessous de l’Enns, ceux du Tyrol, de Salzbourg, de la Styrie, de la Carinthie, de la Bohême occidentale, etc. sont d’origine bavaroise, et, d’après leur langue, leurs coutumes, leur manière de vivre, ne font qu’un avec ceux de la Vieille-Bavière… La mission de nos compatriotes résidant au-delà des frontières est magnifique et noble. » Il résulte de tous ces textes que les patriotes bavarois considèrent leur patrie comme encore incomplète et qu’ils en désirent l’agrandissement un peu aux dépens de la Prusse, mais surtout de l’Autriche.

  1. R. Fester, Ein Jahrhundert bayerisch-willelsbachischer Geschichte, dans la Deutsche Rundschau, 1899.
  2. Fr. Franziss, op. cit. p. 1.