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passerelle où se succéderont les orateurs, avance, sous le quadruple abat-voix et les nouveaux mégalophones géants, jusqu’aux deux tiers de la salle, surplombe les premiers rangs des délégués.

Des milliers de drapeaux et étendards, formant faisceaux, losanges, étoiles, qui ornent les piliers, courent le long des tribunes, escaladent les cintres. Huit projecteurs d’une formidable et aveuglante puissance, et qui soulèvent d’abord les protestations unanimes des assistants, permettront, aux moments pathétiques ou touchants, de cinématographier les scènes. Des guirlandes de lampes éclairent en tout temps la salle.

C’est maintenant, en bas, un océan de têtes ; c’est dans les tribunes, avec les toilettes claires des femmes, et les milliers d’éventails qui battent, une mer de couleurs. Pour attendre l’ouverture de la séance, là-bas, très haut, tout au fond, un orchestre joue des hymnes nationaux, des fox-trots et des gigues. Dans l’intervalle des morceaux, les conversations entretiennent le bruit.


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Tels sont la figuration, les alentours du décor, le décor. Le drame qui va se jouer, plus justement le combat qui va se livrer là est sans doute le plus important de l’histoire américaine, car il doit avoir sa répercussion dans l’histoire du monde. Du choix du candidat qui aura lieu samedi dépendra, en effet, l’avenir du parti républicain, conséquemment l’orientation de la politique américaine, c’est-à-dire l’organisation de la paix ou de la guerre mondiale. Comment se présente aujourd’hui la situation ? Quelles sont les forces en présence ?

Le grand objectif à atteindre pour le parti républicain, est, naturellement, le renversement de l’administration démocrate et, plus immédiatement, le choix d’un candidat qui inspire confiance au pays et soit capable d’opérer, lors de l’élection finale de novembre, ce renversement. Rien, en vérité, ne semblait plus facile, il y a trois semaines, que d’y réussir, et lorsque la maladie du président, l’absence d’un leader démocrate, les rivalités des prétendants, la grande scission surtout des politiciens du parti, la tendance générale du pays enfin à rejeter tous les maux du présent régime sur les gouvernants actuels, d’autres causes encore semblaient mettre toutes les chances du côté républicain. Depuis lors pourtant, un grand fait s’est