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comment finit la guerre.

sion dans le droit public, et, en le sanctionnant par son silence, malgré les instantes demandes de la France, l’Europe s’est rendue complice de cette injustice, dont elle a ensuite porté lourdement le poids. Car en politique comme en morale, les fautes et les crimes s’enchaînent. Victorieuse en Allemagne et en Europe, la Prusse a établi que le succès excuse tout. Les résultats de ses victoires en 1864, 1866, 1870-71 expliquent son agression de 1914.

Mais cette fois, le coup était manqué, et tous les gains antérieurs compromis. La délivrance de l’Alsace et de la Lorraine était un immense soulagement pour la conscience universelle. Les populations accueillirent les troupes françaises avec une joie égale qui se manifesta selon leur tempérament. À Strasbourg, les cris d’allégresse montaient jusqu’au ciel à perdre haleine. À Metz, la foule, émue jusqu’au fond du cœur, restait presque silencieuse, avec des larmes plein les yeux.

En Belgique, la même joie accueillait les troupes nationales. Le retour du roi soldat et de la vaillante reine Élisabeth fut salué à Bruxelles avec un enthousiasme délirant.

L’Angleterre connut aussi les joies du triomphe. Le 21 novembre, en exécution de l’armistice, les soixante-dix plus belles unités de la flotte allemande vinrent se rendre à la flotte anglaise et rallièrent la base navale de Rosyth, escortées par des navires de guerre anglais, français et américains. Cet armement colossal couvrait sur la mer un espace de 25 kilomètres de longueur sur 11 kilomètres de largeur. À l’heure prescrite, les soixante-dix navires allemands amenèrent simultanément leur pavillon de guerre dans un silence impressionnant.

L’OCCUPATION DE LA RHÉNANIE


Après la délivrance de l’Alsace-Lorraine et de la Belgique, les armées alliées suivirent leur marche méthodique vers le Rhin et les trois têtes de pont, Mayence, Coblence, Cologne. Sur la demande des autorités civiles et militaires, des détachements légers durent les devancer à Sarrebruck et à Mayence, où ils rétablirent l’ordre menacé par la révolution. Leur présence suffit d’ailleurs à assurer le calme.

Avant de franchir la frontière, l’ordre suivant avait été lu aux troupes de la 10e armée, qui se dirigeait précisément sur ces points :