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savamment dosée de socialisme modéré, d« démocratie prudente et de confessionnalisme souple, veut grouper toutes les classes, défendre les intérêts du prolétariat et de la libre entreprise, éviter les conflits religieux.


II

C’est au nom de cette politique que l’on veut résoudre les problèmes actuels. Oui, mais ces problèmes sont ardus. L’art des compromis, cet art où la Frankfurter Zeitung, dans un article récent, voyait le secret même de la politique à venir, n’est point aisé à pratiquer. Il donne à un gouvernement toutes les apparences de la faiblesse et favorise toute opposition résolue, qu’elle vienne de gauche ou de droite. On mécontente toujours les partis extrêmes. Car nous avons, non pas deux Allemagnes, mais trois en réalité : une Allemagne socialiste, une Allemagne monarchiste et, entre les deux, une Allemagne moyenne, qui gouverne sans réussir à satisfaire les tempéraments excessifs et qui est elle-même travaillée par de graves dissentiments. Les trois partis de la coalition ont chacun sa gauche et sa droite. Ce sont tiraillements perpétuels, échanges constants de parti à parti, marchandages indéfinis qui rendent singulièrement difficile l’estimation des forces en présence.

En fait, d’octobre 1919 à mars 1920, cette politique de coalition n’a résolu aucun problème essentiel. Elle n’a qu’ébauché des solutions. Il en fut ainsi pour l’unité allemande, les impôts, les conseils d’entreprise, le problème économique, la question militaire.

Il n’y a qu’une manière de renouveler, pour la paix européenne, l’unité allemande. Il faut morceler la Prusse et la diminuer territorialement. Seule une politique énergique pouvait faire œuvre créatrice sur ce point. Lorsque l’Assemblée prussienne proposa, en décembre, la convocation d’une conférence des États, en vue d’établir l’unité du Reich sur des bases solides et définitives, c’est une explosion de particularisme qui en résulta. La Prusse offrait de « s’absorber » dans le Reich, mais avec toute sa masse territoriale. Or les États plus petits, ceux du Sud en particulier, se demandaient si la Prusse n’allait pas, au contraire, absorber à nouveau le Reich ! Ils exigeaient donc de la Prusse qu’elle donnât l’exemple et consentît à son