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seulement de m’excuser, mais de me plaindre un peu, si ce genre de vie n’avait aussi quelques compensations, et de la nature tout justement de celles que j’ai trouvées à Rome. Le Saint Père, que j’ai trouvé aussi bien portant que jamais, d’esprit toujours aussi lucide et aussi ferme, a bien voulu me faire en effet le plus bienveillant accueil, et m’encourager dans la tâche que j’ai entreprise. Mieux encore que cela ! Comme je lui demandais s’il croyait que j’eusse passé la mesure, et, comme on me l’a reproché, trop maltraité la raison, cette raison raisonnante en laquelle on met aujourd’hui trop de confiance : « Et moi, je vous donne la mission de continuer, » m’a-t-il dit, totidem verbis. Votre Grandeur peut penser si je l’en ai remercié, et elle sait que je n’abuserai pas de l’autorisation, que je lui serai même reconnaissant de ne pas trop ébruiter. Mais enfin, c’était une parole dont j’avais besoin, et que je ne publierai pas sur les toits, mais dont je saurai me souvenir. Ils sont quelques-uns qui s’en apercevront.

Je remercie bien Votre Grandeur de l’accueil qu’elle a fait à mon petit volume[1]. S’il ne le mérite assurément pas pour lui-même, il en est digne pour l’émoi que je vois qu’il excite parmi quelques protestants. L’aveuglement du Journal de Genève va jusqu’à me reprocher, dans une Histoire de la Littérature, de n’avoir pas osé sacrifier Bossuet à Richard Simon. Ils ne pardonneront jamais au grand homme son Histoire des Variations et les terribles Avertissements.

Mais au lieu de mettre tout cela par écrit, quand pourrai-je, Monseigneur, en causer-avec vous de vive voix ? Ne viendrez-vous pas prochainement à Paris ? et si vous y venez, ne voudrez-vous pas m’en informer ? Car, pour moi, j’ai tout l’air maintenant de ne pouvoir plus m’absenter avant huit ou dix mois. Je ne voudrais pas attendre jusque-là le plaisir de vous revoir, et de vous redire combien je vous suis reconnaissant de toutes vos bontés ! Mme Brunetière se rappelle respectueusement au souvenir de Votre Grandeur, et moi, je la prie d’agréer l’hommage des sentiments avec lesquels je suis, du fond du cœur, son très humble et très obligé.

  1. Il s’agit du Manuel d’histoire de la Littérature française.