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ou d’hommes d’action morts ou vivants, discussions d’idées ou de faits, essais sur des livres qui viennent de paraître, méditations même, il y a un peu de tout dans ces alertes et pleins volumes. Je sais des lecteurs, — et des lectrices, — que les dimensions imposantes de l’Allemagne religieuse effraient un peu, et qui goûtent vivement ces ouvrages. Sous une forme plus libre, moins impersonnelle et plus variée, ils y retrouvent toutes les qualités d’information, de vigueur, d’autorité et d’élévation spirituelle qui forment l’habituel apanage de l’écrivain ; et ils sont heureux d’y voir reparaître, à tous les tournants, s’enrichissant progressivement de nuances et de précisions nouvelles, l’idée maîtresse, dont il poursuit inlassablement l’illustration. Cette idée, dont l’histoire française de demain pourrait bien mettre définitivement en lumière la profonde justesse et la fécondité, est que le catholicisme, bien conçu et généreusement pratiqué, loin d’être la grande « force de réaction » que dénoncent les préjugés à la mode, est au contraire l’une des grandes forces sociales de l’avenir. Pour régler les rapports, si souvent faussés, entre le capital et le travail, entre l’État et les individus, l’Église dispose non seulement d’indications théoriques, mais de directions pratiques éprouvées. Qu’elle n’hésite pas à approfondir, à développer ses réserves doctrinales, à pousser à l’action positive ceux qui viennent à elle. Et un jour viendra, plus prochain peut-être qu’on ne pense, où, sur ce terrain imprévu, se rencontrant avec elle, le monde étonné devra constater que tous les progrès qu’il avait conçus, tous les rêves de justice sociale dont il s’était enivré, tout cela était contenu en germe dans la divine parole : Misereor super turbam...

Dans l’intervalle de ses études d’histoire religieuse, Georges Goyau avait été amené à s’occuper de diverses questions d’histoire politique et scolaire. De très nombreux documents épistolaires sur les origines de la Ligue de l’enseignement, d’autres pièces imprimées qui n’ont jamais été déposées à la Bibliothèque nationale, mais que certaines bibliothèques privées ont précieusement conservées, avaient été mis libéralement à sa disposition. En dépouillant avec sa conscience habituelle ces multiples documents, il se rendit compte que l’anticléricalisme, dans la France contemporaine, avait, en fait, partie liée avec des doctrines qui, sous le couvert d’un vague humanitarisme et d’un pacifisme militant, aboutissaient à la négation de l’idée de