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essais de propagande pangermanique et même les tentatives de désordre. Elle abuse de ce que la commission interalliée, dont le chef est le général Le Rond, n’a à sa disposition dans tout le pays que trois mille Italiens et sept mille de nos chasseurs alpins. Pas un soldat américain, pas un soldat anglais. L’Allemagne espère entraver, par ses intrigues, l’œuvre délicate de la commission, déconcerter les habitants, décourager la majorité polonaise. Elle espère surtout qu’à Spa l’Angleterre se désintéressera du sort de la Haute Silésie et de la vitalité de la Pologne. La France seule, sans doute, se montrera intransigeante sur le maintien de l’article 88. Mais si la France comprend qu’elle doit choisir entre la réparation de ses dommages et la consultation populaire de la Haute-Silésie, elle sera bien forcée d’opter pour son propre intérêt. Dès lors, quoi de plus facile? Le gouvernement allemand viendra exposer aux négociateurs de Spa qu’il lui est impossible de payer sa dette, s’il n’a pas le moyen de relever immédiatement son industrie, et que, pour la relever, il a besoin de charbon. Ce n’est pas assez, dira-t-il, que, par l’article 90 du traité, la Pologne se soit engagée à autoriser, pendant une période de quinze ans, en franchise de tous droits, l’exportation en Allemagne des produits miniers de la Haute-Silésie. Il faut que ces produits nous soient réservés. Le seul moyen pour nous d’en avoir l’assurance est d’empêcher que la Haute-Silésie ne devienne polonaise. Tout au plus consentirions-nous, pour le moment, à la constitution d’un État neutre, qu’une Puissance, comme l’Angleterre ou l’Italie, administrerait en vertu d’un mandat donné par la Société des Nations. Plus tard, nous aviserions.

Ainsi, l’Allemagne s’est promis de ne pas revenir de Spa les mains vides et, si elle nous donne quelque satisfaction sur le montant de notre créance, elle prendra sa revanche sur la Pologne, c’est-à-dire sur un pays dont l’amitié nous est précieuse, et, en même temps, sur les mines, qui sont, à ses yeux, le gage le plus sûr de sa prompte résurrection économique et de sa future hégémonie industrielle. Ce ne sont pas les élections allemandes qui modifieront ces dispositions. Le premier Reichstag de la République vient de sortir d’un mode de scrutin très perfectionné, une représentation proportionnelle intégrale qui laisse loin derrière elle le système bâtard de notre dernière législation française. Mais quelles qu’aient été le*s pertes des majoritaires et des démocrates, quels qu’aient été les gains des indépendants et des populaires, le nouveau Reichstag épousera certainement, dans l’application du traité, toutes les passions de la