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presbytère et ouvert en présence de quelques prêtres et de plusieurs médecins, convoqué par M. Haumel. Dès le premier coup et œil, les assistants furent frappés de la disproportion étrange existant entre les bras, les jambes et le tronc du squelette : le corps était celui d’un enfant ; les membres semblaient appartenir à un sujet d’un âge plus avancé. Mais, à considérer la calotte du crâne, sciée au-dessus du niveau des orbites, quelques restes d’une chevelure d’un blond roux qui semblaient y adhérer encore, on ne douta plus qu’on se trouvait en présence de la dépouille de l’enfant autopsié au Temple, et les docteurs Milcent et Récamier, assistés de leurs confrères Tessier et Davasse, l’examinèrent attentivement. De leur rapport il ressort que ces ossements étaient très vraisemblablement ceux d’un « sujet » masculin, mais présentaient « des particularités anormales. » — « Les côtes et les clavicules sont certainement d’un très jeune sujet, écrivent les docteurs Milcent et Récamier ; la tête et les os du tronc semblent indiquer un âge plus avancé, — douze ans environ ; — les membres et les dents sont d’un adulte de quinze à dix-huit ans. » Les conclusions furent indécises : elles demeurent troublantes et sont ainsi formulées : — « Il paraît démontré que ces ossements sont ceux de l’enfant détenu au Temple et dont l’autopsie fut faite par les docteurs Dumangin, Pelletan, Lassus et Jeanroy… mais il est absolument impossible que ce squelette soit celui d’un enfant de dix ans et quelques mois : il ne peut avoir appartenu qu’a un jeune garçon de quinze à seize ans… »

Quarante-huit ans après l’exhumation de 1845, la question n’ayant point fait un pas, en dépit d’efforts répétés et méritoires pour la faire avancer, une nouvelle enquête fut entreprise, à la demande de maître Laguerre. On ouvrit à nouveau le sol de Sainte-Marguerite, on retrouva, à l’endroit où les avait déposés M. l’abbé Haumel, les ossements renfermés par lui dans une botte de chêne portant sur l’un de ses côtés l’inscription L…XVII, on les exposa durant quelques jours à la piété des curieux et aux investigations des savants ; les uns et les autres se présentèrent fort nombreux et des spécialistes, messieurs les docteurs de Barker, Bilhault, Magitot et Manouvrier décideront qu’on avait bien là le squelette déjà exhumé en 1846 : on reconnut « le crâne sectionné à la scie par une main très experte ; » la courbure des côtes, « le peu de développement de