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comment finit la guerre.

le 15. Ne pouvant réunir les deux poches de Montdidier et de Château-Thierry, Ludendorff essaya d’élargir tout au moins la dernière et prononça le 18 juin une violente attaque de nuit sur Reims. Mais le 1er corps colonial Mazillier tint bon et la repoussa. Ni par une action méthodique soigneusement montée contre des positions organisées, ni par des attaques violentes contre des troupes sommairement établies, l’offensive allemande n’avait obtenu de résultat décisif.

L’offensive du 27 mai avait résonné en France comme un coup de foudre. On s’expliquait ce recul du 21 mars par le choix du point d’attaque à la liaison entre deux armées alliées, mais c’était la première fois, depuis août 1914, que les troupes françaises cédaient. Personne ne se rendait compte que l’attitude défensive comporte le risque de se trouver très faible sur l’ensemble du front et par conséquent à la merci de l’initiative ennemie. L’ensemble du pays supportait bien cette épreuve, mais Paris, qui s’était pourtant habitué au bombardement des pièces à longue portée, se sentait directement menacé. L’opinion parlementaire s’inquiétait et incriminait le commandement militaire, au moment même où la situation se stabilisait grâce à ses efforts. — Le 4 juin, à la tribune de la Chambre des Députés, le président Clemenceau trouva dans son ardent patriotisme les paroles nécessaires pour calmer le Parlement et conserver à la nation la confiance dans ses destinées. Couvrant les chefs des armées, il dit : « Nous remporterons la victoire si les pouvoirs publics sont à la hauteur de leur tâche. Je me bats devant Paris ; je me bats à Paris ; je me bats derrière Paris. »


Ludendorff nous apprend qu’il a hésité à entreprendre une nouvelle offensive après celle du 27 mai, qui ne s’est guère terminée qu’au milieu de juin. Les effectifs et le moral de l’armée allemande baissent en même temps. Ses grands succès n’ont pas atteint d’objectif stratégique important et le laissent avec une ligne très contournée, qui présente des flancs très vulnérables. Il lui est bien difficile de s’arrêter dans sa position actuelle : il faudrait donc reculer et il n’y peut songer : « J’ai réfléchi profondément pour savoir si, étant donnés la situation de l’armée et l’état de nos effectifs, il n’était pas plus avantageux de rester sur la défensive. Je repoussai cette pensée. Outre l’effet défavorable