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verrons, au cours de cette année, obligé de supprimer 22 divisions pendant la bataille, tandis que les autres, réduites, faute de renforts, à des effectifs tout à fait insuffisants, laisseront le front s’effondrer. En revanche, il suffisait à l’Angleterre d’un peu plus de rigueur dans l’application de la conscription pour obtenir de sa nouvelle loi des contingents plus importants. Quant à la France, le remplacement de M. Painlevé par M. Clemenceau comme chef du gouvernement avait arrêté les ravages de la démobilisation. Les ressources militaires de son empire colonial commençaient enfin, sous l’action d’une volonté énergique, à donner leur rendement. Enfin l’arrivée des réserves américaines eût rétabli l’équilibre des forces en faveur des puissances alliées et associées.

Quoi qu’il en fût, l’offensive allemande était certaine ; il fallait la prévenir, ou en tout cas tenir prête une riposte énergique. Dans cette phase de la guerre, toute attaque devait certainement réussir au début, gagner du terrain, rejeter la défense en rase campagne après lui avoir infligé des pertes beaucoup plus grandes que celles de l’attaque. La bataille était inévitable au commencement du printemps et devait donner à l’assaillant un premier succès, dont il était impossible de prévoir les conséquences. Il était donc très imprudent de se résigner à la défensive. Néanmoins, l’idée de l’offensive n’avait pas encore été comprise par les gouvernements alliés, et les propositions du général Foch furent écartées.

Il avait fait admettre qu’une réserve interalliée serait constituée à la disposition du Comité exécutif du Conseil suprême de guerre. Ce retour bien timide vers l’unité de commandement ne fut suivi d’aucune espèce d’effet ; les deux commandants en chef ne jugèrent jamais à propos de constituer la fraction de cette réserve qui leur incombait.

Dans une conférence qui se tint à Londres les 14 et 15 mars, sept jours avant l’attaque allemande, cette manière de voir fut admise, malgré les instances du général Foch, que ne soutint nullement le chef du gouvernement français, et la constitution de cette réserve interalliée fut renvoyée à une date indéterminée.

Pour être prête à agir sur l’un ou l’autre front, elle aurait dû se trouver vers les arrières de leur point de jonction, vraisemblablement dans la région de Compiègne. Ce point faible fût alors devenu le point fort du front anglo-français. Mais, faute