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quarante-trois ans et qui leur a donné en retour des esprits assouplis et habitués à conduire leurs investigations. Ce travail est sans conteste le mérite de tous, mais, dans cette œuvre collective, il est juste de signaler l’École de guerre comme le centre principal d’où partaient les ondes de travail, d’où elles étaient émises selon une méthode rigoureuse qui en décuplait la force d’expansion.

En résumé, on peut donc dire que nos officiers entrèrent en campagne avec des connaissances du métier satisfaisantes et une aptitude indéniable à vite comprendre l’inconnu que leur réservait la guerre. Et Dieu sait qu’en cinq ans la guerre leur en a révélé !

L’épreuve d’ailleurs commençait tout de suite : les vides se produisaient dans les cadres avec une rapidité terrible ; il fallut les remplir. En même temps, le problème se compliquait ; car non seulement la bataille exigeait un remplacement ininterrompu des cadres, non seulement les nouvelles formations dont nous avons dit l’importance absorbaient sans répit les officiers et les sous-officiers, mais en même temps l’industrie jetait sur le champ de bataille une machinerie énorme toute nouvelle et d’un maniement délicat.

Le rendement de cette machinerie varie de 0 à 100 avec l’instruction des cadres et de la troupe qui l’emploient. J’ai vu à la bataille de la Somme un régiment d’infanterie entrer en ligne trois semaines après avoir reçu ses fusils mitrailleurs, combattre pendant 15 jours victorieusement et, après relève, constater que plus de la moitié de ses engins était restée dans la boue du champ de bataille. Le régiment qui le relevait subit exactement les mêmes épreuves, sur le même terrain, dans la même boue, et cependant après relève, il ramenait en arrière tous ses fusils mitrailleurs. Pourquoi ? Parce qu’il était resté quinze jours de plus à l’instruction : connaissance inégale de l’arme, d’où intérêt plus ou moins grand à sa conservation.

Même observation pour l’artillerie ; au commencement de la campagne, des groupes de 155 Rimailho ont fait merveille à côté d’autres complètement paralysés par la délicatesse d’un mécanisme peu connu. L’entrée en ligne des 155 C. Schneider à la bataille de la Somme a accusé entre les groupes des différences tout aussi marquées ; il en fut de même plus tard avec l’artillerie portée. Il a fallu une année pour que des