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cité héroïque. Le fort tomba le 7 juin. Sa chute découvrait le fort de Souville, déjà, menacé par la progression allemande qui descendait de Douaumont ; la ferme de Thiaumont tombe, le bois de la Caillette est repris ; il semble que l’héroïsme du soldat français soit impuissant devant cette avance en quelque sorte mécanique.

Le général Pétain a pris le commandement du groupe des armées françaises du Centre et le général Nivelle celui de l’armée de Verdun. Le général Pétain a déjà, en mai, attiré l’attention du général Joffre sur la gravité de la situation. Il y revient le 11 juin et insiste pour que l’offensive projetée sur la Somme ait lieu le plus tôt possible. Dès le lendemain, le général Joffre répond que toutes les dispositions sont prises à cet effet, mais qu’il faut à tout prix continuer la lutte sur la rive droite et risquer même la perte des batteries qui se replieraient bien difficilement.

Pourtant l’avance allemande continue sur la rive droite, malgré l’énergie du général Nivelle, qui ne cesse de prescrire la contre-attaque instinctive, immédiate. C’est sur ce terrain que se concentre tout l’effort de l’agresseur, qui monte une grande opération ayant pour premiers objectifs l’ouvrage de Froide-Terre, le village de Fleury et le fort de Souville. Cette ligne atteinte, les anciens forts de la côte Saint-Michel-Belleville seront facilement enlevés et les Français seront acculés à la Meuse, les ponts sous le tir de l’artillerie allemande. Dix-neuf régiments, appartenant à sept divisions différentes, vont s’engager, les renforts et les réserves très approchés de la première ligne pour profiter des premiers succès et assurer la puissance et la continuité de l’effort. C’était l’attaque la plus importante et la plus massive que Verdun eût jamais supportée.

L’artillerie a été très renforcée et commence sa préparation dès le 20 juin avec une intensité jusqu’alors inouïe. Le 23 au matin, les tranchées de première ligne sont littéralement retournées et l’infanterie allemande ne trouve presque aucun défenseur dans le commencement de son attaque. Elle atteint le ravin du Bazil, Fleury, l’ouvrage de Thiaumont, et pénètre même dans les fossés de l’ouvrage de Froide-Terre, où les éléments avancés sont faits prisonniers. Mais les contre-attaques françaises l’arrêtent. Le général Mangin, qui commande le secteur à cheval sur la Meuse, les lance sans répit. Elles se