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comment finit la guerre.

droite, il ne peut donc être question d’arrêter l’ennemi que sur cette rive. » Le général de Castelnau arrive à 7 heures du matin à Verdun, où sa seule présence apporte du calme et du réconfort. Sans intervenir directement dans la bataille, il règle l’arrivée des renforts, qui arrivent maintenant nombreux, et veille à leur utilisation.

Les renseignements qui arrivent de la ligne de feu sont confus et très inquiétants. Une 7e division de renfort, qui se battait très énergiquement depuis la veille, sa gauche à la Meuse, se replia dans la journée sur l’ordre de son général et s’établit sur la côte de Belleville. Une initiative heureuse arrêta l’ennemi par un infranchissable barrage d’artillerie et permit à une autre division de reprendre une partie du terrain abandonné. Mais il semble bien que si l’ennemi s’était acharné ce jour-là, s’il eût engagé au bon moment des réserves fraîches, il serait parvenu à tout le moins sur la côte de Belleville, et ce progrès eût rendu bien difficile notre maintien sur la rive droite. Mais il attaquait sur un trop petit front, se limitant entre la Meuse et la Woëvre, et dans ces conditions, l’arrivée de renforts restreints suffisait à fermer la brèche et à limiter le recul.

Au centre, on s’est battu toute la journée autour du fort de Douaumont, dont la tourelle de 155 a tiré à peu près constamment depuis quatre jours ; le fort n’a aucune garnison, sauf l’équipe de vingt-trois canonniers qui sert cette pièce et qui, à bout de forces, dort au petit jour. Une patrouille du 24e brandebourgeois, trouvant baissé le pont-levis, pénètre dans le fort et s’y installe sans tirer un coup de fusil. Tel est le résultat du décret mal compris, qui transformait les camps retranchés en régions fortifiées, et peut-être aussi d’une insuffisance de liaison entre deux unités de première ligne qui auraient dû se souder étroitement dans le fort de Douaumont, au lieu de s’y appuyer toutes deux, l’une à l’Est, l’autre à l’Ouest du fort. L’important ouvrage d’Hardaumont, qui complétait la défense des forts de Douaumont et de Vaux, n’avait pas de garnison, et il fut abandonné à l’ennemi sans un simulacre de résistance.

La journée était mauvaise. La prise de Douaumont fut annoncée au monde entier dans un communiqué triomphal : « À l’Est de la Meuse, devant Sa Majesté l’Empereur et Roi qui était sur le front, nous avons remporté des succès importants… Dans une vigoureuse poussée en avant, des régiments de Bran-