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la compagnie anglo-hollandaise, sont excellents, tandis que les huiles américaines ne laissent pas d’avoir quelques défauts, comme nous l’avons dit plus haut. De plus, des capitaux français importants sont engagés dans la « Royal Dutch, » bien que, malheureusement, nos nationaux n’aient aucune part dans l’organisation et la direction.

Ouvrons ici une parenthèse pour noter que, sans vouloir le moins du monde préconiser « l’Étatisme, » on ne peut s’empêcher de regretter que, dans le passé, l’Etat français ne se soit pas suffisamment occupé de défendre les capitaux français employés à l’étranger ou qui se proposaient d’y être utilisés. Non seulement il n’a pas mis en garde ces capitaux, — constitués souvent par la petite épargne, — contre des placements aventureux, dangereux même et qu’il devait savoir tels[1], mais encore il n’a pas su obtenir qu’une entreprise qui absorbait des capitaux français dans la proportion considérable de 40 p. 100 du capital total (c’est le cas de la « Royal Dutch ») fit une place dans ses conseils et dans son personnel d’exploitation aux représentants qualifiés de ces capitaux.

Comment procèdent, à ce sujet, nos amis d’Angleterre ? On sait assez quelle considération le gouvernement britannique montre pour tous ceux de ses nationaux qui agissent à l’étranger et avec quel soin il protège leurs intérêts. Tous ceux qui ont suivi, — fût-ce de loin, — pendant la Grande Guerre, les négociations auxquelles donna lieu l’organisation rationnelle du blocus de l’Allemagne « au travers des neutres » (et M. Denys Cochin a fait à cet égard de curieuses révélations à la Chambre, en 1917), se sont convaincus que le Foreign Office poussa singulièrement loin le souci d’étendre sur les trafiquants anglais le bouclier auquel s’appuie d’une main la fière Albion, tandis que, de l’autre, elle dresse le trident dérobé à Neptune.

Mais en ce qui touche « la politique du pétrole, » l’État britannique ne se contente plus d’encourager, de favoriser, de défendre les siens, il agit vigoureusement pour eux, dès le début ; bien mieux, il fait des conquêtes ou établit des protectorats qui semblent avoir pour objet essentiel de ménager d’une manière exclusive à ses nationaux l’exploitation de nouveaux champs pétrolifères, — en Perse, par exemple. Songe-t-il à en

  1. On peut citera cet égard l’emprunt ottoman de 1914, qui servit en grande partie à payer les fournitures de l’Allemagne en matériel de guerre.