Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 55.djvu/464

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui les sépare. Autrement dit, et par exemple, c’est l’angle sous lequel on verrait un cercle d’un mètre de diamètre placé à 200 kilomètres de distance, ou encore c’est l’angle sous lequel on verrait un objet d’un millimètre placé à 200 mètres. Or la parallaxe de l’étoile la plus rapprochée n’atteint pas cette valeur. Autrement dit, la distance de l’étoile la plus voisine de nous est plus de 200 000 fois supérieure à la base qui a permis de la mesurer. Cela veut dire que cette étoile est plus de 200 000 fois plus loin de la terre que le soleil lui-même qui en est à environ 150 millions de kilomètres.

Pour illustrer immédiatement tout ceci par une donnée concrète, je rappelle que l’étoile la plus rapprochée de nous était, d’après ce qu’on croyait encore il y a très peu de temps, l’étoile Alpha de la constellation du Centaure, étoile visible seulement dans l’hémisphère austral.

La parallaxe de cette étoile est de 76 centièmes de secondes d’arc, c’est-à-dire que sa distance à la terre est 2 800 000 fois plus grande que celle qui nous sépare du soleil, et qu’elle est de quarante mille milliards, de quarante trillions de kilomètres.

En réalité, un fait nouveau s’est produit récemment dans cet ordre d’idées : l’astronome anglais Innes a découvert que l’étoile la plus voisine connue n’est pas Alpha du Centaure, mais une très petite étoile placée d’ailleurs dans les mêmes parages, et dont la parallaxe est égale à 78 centièmes de seconde d’arc. C’est donc l’étoile connue la moins éloignée de nous. On l’a appelée Proxima Centauri. Elle n’a été observée que récemment parce que c’est une étoile très peu brillante (de 13e grandeur, tandis qu’α Centaure est de 1re  grandeur). C’est d’ailleurs par la photographie que M. Innes a mesuré sa parallaxe. Cette curieuse étoile offre cette particularité d’être, de toutes les étoiles connues, celle qui a le plus petit éclat réel connu, puisque sa luminosité, la quantité totale de lumière répandue par elle n’est que la dix-millième partie de celle que répand notre soleil, qui n’est pourtant, de loin, pas une des plus brillantes parmi les étoiles. Mais ceci est une autre question sur laquelle je reviendrai quelque jour.

De tout cela il résulte, pour ne pas nous écarter de notre sujet qui est la mensuration de l’univers, qu’il est mal commode, fastidieux et vain, de vouloir exprimer en kilomètres les distances des étoiles, car on arrive alors à des nombres avec lesquels notre imagination n’est pas familiarisée et qui, à cause de leur grandeur même, linissoiit par ne plus rien nous représenter de précis. On a donc