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REVUE SCIENTIFIQUE.

pellent aussi, — et on ne saurait trop revenir sur ce fait si caractéristique de la puissance des méthodes scientifiques, — que l’analyse spectrale de la lumière du soleil a permis d’y découvrir, à 750 millions de kilomètres de notre œil, un élément chimique nouveau, l’hélium, de longues années avant qu’on ne le trouve dans l’air même que nous respirons.

Pour expliquer les raies diverses qui caractérisent un élément chimique donné, le fer par exemple, et dont chacune correspond à une vibration, de longueur donnée, de la lumière (de même que divers diapasons donnent des sons plus ou moins hauts), on a été obligé d’admettre que la particule infime de fer qui émet cette onde lumineuse vibre, tourne avec une vitesse prodigieuse, de telle sorte qu’une de ses vibrations correspond à la longueur de l’onde lumineuse émise. Mais comme le fer est caractérisé, non pas par une, mais par plusieurs raies spectrales lumineuses, on a été obligé d’en conclure que la particule qui émet ces raies ne subit pas une vibration unique et simple, mais une vibration très complexe, dans des sens et avec des vitesses diverses, de même que fait la corde d’un violon qui n’émet pas seulement un son donné, mais en même temps une foule d’harmoniques, superposées à ce son et qui précisément caractérisent le timbre de l’instrument. Mais, dans le cas de la corde de violon, on comprend qu’il puisse y avoir plusieurs sons superposés émis simultanément, car la corde n’est pas un bloc rigide, mais un objet souple dont chaque fraction, chaque centimètre, peut vibrer individuellement, indépendamment de l’ensemble, tout en participant à la vibration générale de celui-ci.

La même explication ne tient pas, ou du moins devient singulièrement insoutenable, s’il s’agit des vibrations d’une particule matérielle, d’un atome considéré comme rigide et indéformable, ainsi que le voulait la chimie classique… ou plutôt naguère classique. Cela est d’autant plus difficile à soutenir dans ce cas, que le nombre des raies spectrales émises par certains éléments, comme le fer précisément, est très grand et atteint plusieurs centaines.

De tout cela, certains physiciens qui aimaient à remonter des effets aux causes ont déduit dès le siècle passé que les diverses raies du spectre d’un corps donné devaient être dues non pas aux vibrations des atomes entiers, considérés comme rigides, insécables, indéformables, mais à celles de plus petites particules qui devaient constituer ces atomes. Dans cette conception, la multiplicité des raies d’un spectre donné devenait facilement explicable, chaque raie