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C’est par l’exposé succinct de cette dernière et admirable méthode que je voudrais terminer cette première partie de mon exposé.

J’ai déjà dit que, d’après la théorie cinétique, les molécules d’un fluide (gaz ou liquide) sont agitées de mouvements continuels, dans tous les sens, qui se font à très grande vitesse, entrechoquent les molécules un très grand nombre de fois chaque seconde et produisent la pression apparente du fluide sur les parois du vase qui le contient.

De même que les vagues de la mer pourront à grande distance n’être pas aperçues directement par un observateur, mais lui être révélées pourtant par le balancement d’un bateau plus grand qu’elles ; de même on peut se demander si des particules assez grosses pour être visibles et en suspension dans un fluide ne pourront pas de quelque manière déceler les mouvements des molécules invisibles de ce fluide. Tel est précisément le cas pour le mouvement brownien, ainsi appelé du nom du botaniste anglais, Robert Brown, qui a découvert ce phénomène merveilleux. Si on observe au microscope les mouvements de particules suffisamment petites en suspension dans un liquide tel que l’eau, on les voit agitées de mouvements dans tous les sens qui ne cessent jamais, et qui (cela a été prouvé), n’étant dus ni à la diffusion, ni à des inégalités de température ou des courants, ni à la nature même des particules, sont causés nécessairement par les impulsions en tous sens que leur font subir les chocs des molécules du liquide. Ces chocs manifestent l’agitation des molécules invisibles, de même que l’impulsion donnée à une plaque de fer suspendue devant un fusil permet, dans certaines expériences balistiques, de connaître et de mesurer la force vive et la vitesse du projectile, invisible pourtant.

D’autre part, il a été établi, notamment par Van T’Hoff, que les lois de pression et de diffusion des gaz sont les mêmes, quelles que soient la grosseur et le poids des molécules (on s’en doutait déjà, d’après ce que nous avons dit de la loi d’Avogadro). Partant de cette idée, dont tous les développements théoriques avaient été mis au point, M. Jean Perrin a réalisé de très élégantes expériences qui ont fourni récemment de précieuses confirmations à la théorie moléculaire et qui ont apporté, du nombre N, des déterminations nouvelles, en excellent accord avec les précédentes et désormais hors de toute discussion possible.

On connaît les lois de Laplace qui lient la pression en un point de