Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 53.djvu/717

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais si, tout au long de ce brûlant septembre, les après-midis du Palais-Bourbon ont été, non pas peut-être délicieux, pourtant fort intéressants, ce sont surtout les matins qui y furent passionnés. La Chambre, qui aime les jeux alternés, discutait, en effet, le Traité de paix l’après-midi, mais, le matin, elle discutait la loi électorale. On sait qu’une réforme a été, il y a quelque temps, menée péniblement presque à son terme, au milieu de toutes sortes de pièges, chausse-trapes et traquenards. Ce n’est pas, comme on le dit à tort, la représentation proportionnelle ; c’en est, à bien des égards, le contraire ; ce n’en est toujours qu’une application fractionnée, par parcelles souvent infinitésimales. C’est une étrange et doctrinalement absurde combinaison de deux systèmes opposés, du système majoritaire et du système proportionnaliste.

Quels que doivent être les résultats de la prochaine consultation populaire faite selon ce régime, il est indispensable d’avertir que la représentation proportionnelle ne saurait en aucune façon, à aucun titre ni à aucun degré, en être rendue responsable. La machine a été montée à ses dépens autant peut-être qu’à son profit, car l’opération consiste essentiellement en ceci. Les élections législatives se font au scrutin de liste, en principe départemental. Néanmoins, au-dessus d’un certain nombre de représentants, les départements peuvent être divisés en plusieurs circonscriptions. Toute liste ou tout candidat (nous simplifions) qui obtiennent la majorité absolue sont proclamés élus. S’il n’y a point de liste ou de candidat qui l’obtiennent, ou si toute une liste et tous les candidats ne l’ont pas obtenue, les sièges restant à pourvoir sont répartis proportionnellement. Le système proportionnaliste est, au surplus, relié au système majoritaire par l’attribution d’une prime à la majorité relative. Cuisine, comme on le voit, assez compliquée, par quoi le suffrage universel est accommodé à la mode majoritaire, avec une pincée de R. P. Devant la théorie pure, ce métis est un monstre, c’est une horreur. En pratique, il ne peut avoir qu’un seul avantage, qui serait d’avoir tué le scrutin d’arrondissement. Mais le scrutin d’arrondissement a, chevillé au corps, ce qui lui servait d’âme : il ne veut pas mourir encore !

La disposition qui porte que les départements, au-dessus de six députés, pourront être sectionnés, a fourni le prétexte. Comment sectionnerait-on ? Mais, au préalable, sectionnerait-on ou ne sectionnerait pas ? La seule fureur théologique d’un synode byzantin peut donner l’idée de la violence des controverses que partout, dans tous les coins, en séance et hors séance, ce problème, d’une importance