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parenté de race de la population. Néanmoins, il est reconnu, en vertu des conceptions de droit actuelles, qu’une injustice a été commise en 1871, en négligeant de consulter la population. » Seulement « en vertu des conceptions de droit actuelles, » et seulement « en négligeant de consulter la population ! » La malice est cousue de fil blanc, et ce fil est gros comme un câble. « Trop allemand ! » disait déjà un vieux roi de France.

Pour la Sarre, la Délégation allemande vide son chartrier bourré de pièces truquées. « Depuis plus de mille ans (à dater du traité de Meersen en 870), le territoire de la Sarre est allemand. L’occupation passagère, à la suite d’entreprises guerrières de la France, s’est toujours terminée au bout de peu de temps par la rétrocession de ce pays lors de la conclusion de la paix. Dans un laps de temps de 1048 années, la France n’a même pas occupé ce pays 68 ans. Au premier traité de Paris (1814), une petite partie du territoire actuellement convoité resta incorporée à la France, mais la population intéressée éleva une protestation des plus véhémentes et réclama « sa réintégration dans la patrie allemande, » avec laquelle elle s’apparente « par la langue, les mœurs et la religion. » La Délégation française avait en mains de quoi jeter à terre et réduire en poudre tout cet appareil d’erreurs, de contre-vérités, de demi-vérités ou de vérités tendancieusement interprétées. Il est fâcheux qu’elle ne l’ait pas fait.

Il n’y aura pas de plébiscite dans la partie méridionale du Slesvig, mais le Danemark n’y tenait pas, et même il redoutait un piège. Aux clauses territoriales qui regardent la Belgique, pour Moresnel, Malmédy, Eupen, il n’est rien changé. De même, il n’est rien innové aux clauses coloniales et navales qui, depuis l’ouverture de la Conférence, n’ont pas bougé d’une ligne, sont restées immuables dans toutes leurs syllabes, tous leurs points et toutes leurs virgules. En revanche, des modifications ont été apportées aux clauses militaires, complétées par un « Arrangement » particulier entre les États-Unis d’Amérique, la Belgique, l’Empire britannique, la France, d’une part, et l’Allemagne, d’autre part, « concernant l’occupation militaire des territoires rhénans. » Il en a été apporté aux clauses qui définissent le régime international des fleuves et rivières : aux clauses financières et économiques ; aux clauses qui ménagent ou aménagent les réparations ; des modifications ou des promesses de modifications ont ouvert ou entr’ouvert à l’Allemagne, dans un avenir non éloigné, que le texte anglais rapproche encore un peu plus : « in the early future, » la porte de la Société des Nations. C’est imprudent.