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pas le territoire belge. Des événements graves vont se dérouler. Peut-être verrez-vous brûler le toit de votre voisin, mais l’incendie épargnera votre demeure. »

Ce n’est pas que tout le monde en Belgique eût confiance. Les militaires craignaient une entrée allemande en Belgique.) Banning avait écrit des paroles prophétiques, que j’ai reproduites plus haut. Le roi de Roumanie, enfin, nous avertissait…

Déjà cependant, à l’heure où le représentant de l’Allemagne rassurait M. van der EIst, des nuages apparaissaient à l’horizon de la Belgique. L’Angleterre ayant, ce même jour (31 juillet), interrogé le gouvernement français et allemand sur l’attitude qu’ils comptaient prendre vis-à-vis de la neutralité belge, la France répondait dès le lendemain, 1er août, par une déclaration des plus rassurantes, tandis que M. von Jagow, le sous-secrétaire d’Etat allemand pour les Affaires étrangères, se réfugiait derrière des formules vagues et des réticences embarrassées. Il n’avait pas d’instructions ; il devait en référer à l’Empereur et au chancelier ; il laissait entendre qu’il ne pouvait répondre sans dévoiler le plan de campagne éventuel ; enfin, il se plaignait de ce que la Belgique avait déjà pris des mesures hostiles à l’Allemagne, et il en citait un exemple : « La douane belge avait arrêté le 31 juillet un convoi de grains à destination de l’Allemagne ! » Le fait était vrai, mais il est étrange qu’il ait retenu l’attention d’un ministre prussien, car il s’agissait d’un simple malentendu. Le convoi en question avait été mis sous embargo en vertu d’un arrêté royal du 31 juillet interdisant, en prévision de la guerre, l’exportation des grains. Le ministre d’Allemagne à Bruxelles ayant fait remarquer qu’il ne s’agissait pas d’une exportation, mais d’un transit, et, l’observation ayant été trouvée fondée, l’embargo fut levé dès le 1er août. Tel était l’incident minuscule dont faisait état la diplomatie de Berlin en quête d’un grief contre la Belgique : était-ce, oui ou non, une querelle d’Allemand ?

Le lendemain du jour où la douane belge s’empressait de réparer sa légère erreur administrative, de fâcheuses nouvelles arrivaient à Bruxelles : on disait que les troupes allemandes avaient violé la neutralité du grand-duché de Luxembourg et qu’elles occupaient la capitale de ce petit pays. La nouvelle était vraie, mais l’Allemagne trouvait sans doute que la diffusion en était prématurée, car M. von Below tint à rassurer une fois de