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indépendance relative. L’Empereur nommait encore la moitié des trente-huit membres de la Chambre Haute. L’autre moitié comprenait les évêques de Strasbourg et de Metz, le président du Consistoire supérieur de l’Eglise de la confession d’Augsbourg, le président du Comité synodal de l’Eglise réformée, un délégué des Consistoires israélites, le président de la Cour d’appel de Colmar, un professeur de l’Université, des représentants des conseils d’agriculture départementaux, des conseils municipaux et des chambres de commerce de Strasbourg, Metz, Colmar et Mulhouse. Ce petit Sénat conservateur, où le gouvernement s’assurait la majorité, devait, suivant l’expression du chancelier de Bethmann-Hollweg, « être coûte que coûte un rempart contre toute politique non allemande dans la Terre d’Empire »[1].

Seule, la deuxième Chambre ou Chambre basse, élue pour cinq ans au suffrage universel, marquait un progrès considérable sur le régime antérieur, où le pays n’était représenté que par une délégation (Landesauschuss) élue au suffrage restreint, partie à deux et partie à trois degrés. La deuxième Chambre comptait soixante membres répartis en quatre groupes : les Lorrains (onze), le Centre (vingt-huit), les libéraux (dix) et les socialistes (onze). Les Lorrains et le Centre, généralement associés, constituaient la majorité. Le 6 décembre 1911, dans son discours d’ouverture, le président, M. Ricklin, déclarait : « Nous commençons la première session du Parlement d’Alsace-Lorraine, de ce Parlement que le peuple alsacien-lorrain s’est donné sur la base du suffrage universel, égal et secret, et non seulement l’Allemagne, mais le monde politique tout entier, ont les yeux fixés sur nos délibérations. » La deuxième Chambre ne devait pas tarder à justifier les inquiétudes que les conservateurs prussiens avaient exprimées lors de sa constitution.

Le 7 décembre 1912, elle interpelle le gouvernement sur les raisons qui ont provoqué l’annulation de commandes, d’une valeur de plusieurs millions, faites par l’office impérial « es chemins de fer à la Société alsacienne de constructions mécaniques. Cette entreprise française qui, depuis l’annexion, avait transporté une partie de son exploitation à Belfort, a gardé à Grafenstaden, près de Strasbourg, son ancienne usine où elle occupe plus de deux mille ouvriers, parmi lesquels « les

  1. Journal d’Alsace-Lorraine, 1911, n° 3.