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Comité national tchèque estime à environ 800 000, pour la seule Bohême, le chiffre qu’il conviendrait de défalquer des statistiques officielles.

Comment sont répartis les éléments allemands ? En Moravie, ils sont répandus sporadiquement, surtout dans les villes, et si étroitement mêlés à la majorité tchèque (1 869 000) que le gouvernement de Vienne avait renoncé à distinguer des circonscriptions électorales allemandes et tchèques ; elles se superposaient, chaque électeur étant inscrit, selon sa nationalité, dans le collège tchèque ou le collège allemand ; aucune division n’est donc possible. En Silésie, les Tchèques sont seulement 170 000 contre 325 000 Allemands ; mais ils réclament le pays tout entier, parce que, si les Allemands de Prusse s’emparaient de cette région des sources de l’Oder, leur territoire s’enfoncerait comme un coin entre Tchèques et Polonais qui ont besoin d’avoir une frontière commune aussi étendue que possible. D’ailleurs, cette région a été germanisée à une époque relativement récente. La partie orientale de la Silésie autrichienne, qui constituait autrefois le duché de Teschen, est en grande majorité polonaise[1], sauf le district occidental de Fridek. C’est là qu’ont eu lieu dernièrement, entre Tchèques et Polonais, les déplorables incidents qui ont mis une tache de sang entre deux peuples faits pour être frères et dont la bonne harmonie importe au plus haut point à la consolidation de la paix générale.

Reste la Bohême proprement dite. Il existe tout autour du quadrilatère, sauf dans la région où il se relie à la Moravie, des groupes importants d’Allemands ; mais ils sont partout mêlés à des minorités tchèques, qui atteignent souvent 30 et 50 pour 100 dans les régions où les mines attirent des ouvriers slaves. Ces populations allemandes constituent trois groupes distincts, qui ne peuvent pas, administrativement, former une seule province autonome ; les réunir à l’Allemagne serait paralyser le développement de l’Etat tchèque et mettre aux mains des Allemands le moyen de l’étouffer à la première occasion ; la République tchéco-slovaque, isolée au milieu de populations allemandes, a besoin de s’appuyer à ses frontières naturelles pour résister à la pression du germanisme. Prague n’est qu’à 100 kilomètres

  1. Voyez notre article du 15 janvier 1919. — Il y a en Silésie autrichienne 235 000 Polonais.