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Russie et de Prusse dans la patrie restaurée, les Croates et les Slovènes fraternisent pour créer avec les Serbes la grande Yougo-Slavie, les Tchèques, avec les Slovaques, révèlent à l’Europe les progrès qu’ils avaient réalisés dans l’ombre d’une demi-servitude. Un cycle de l’histoire s’achève, dont nous avons dû aller chercher les origines jusqu’au temps des grandes migrations des peuples ; une époque nouvelle s’ouvre pour l’Europe centrale : l’ère slave. Quand on cherche quelles sont, dans l’Europe danubienne, les forces de reconstitution et de progrès, c’est aux Tchèques d’abord qu’il faut aller. En face de Vienne, élégante et artiste, se dresse fièrement Prague, pathétique et superbe.


II

« Il est une petite nation, une bien remarquable nation qui se trouve en Bohème, une nation qui a été opprimée dans le passé, une nation où l’on vit tout le pouvoir aux mains des Allemands, où toutes les situations aussi étaient entre des mains allemandes ; les professions libérales étaient prises par les Allemands ; les magistrats étaient allemands, lus capitalistes étaient allemands, les gérants d’entreprises commerciales ou industrielles étaient allemands. Le Tchéco-Slovaque, dans son propre pays, n’était qu’un haveur de charbon ou qu’un haveur de tourbe. La première chose que le peuple de cette nation résolut de faire, ce fut de s’éduquer. Il établit un système d’éducation nationale qui éleva la nation à une position où elle pouvait revendiquer l’égalité. Il ne revendiqua pas l’égalité avant d’être l’égal des Allemands. Ceci se passa il y a une génération. Il est maintenant un des peuples les mieux éduqués de l’Europe. Les professions libérales y sont exercées par des hommes de sa propre race ; il est à même de faire concurrence aux Allemands, et maintenant, voici le couronnement : il demande son émancipation politique. »

Ainsi parlait M. Lloyd George, le 3 mars dernier, au « diner des Gallois ; » et on ne saurait mieux exprimer la volonté tenace, la méthode persévérante avec laquelle les Tchèques, qui n’étaient plus qu’un petit peuple soumis aux Allemands, se sont préparés à redevenir une grande nation indépendante. Leur travail de cohésion et d’organisation n’est pas encore