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donne une plus claire conscience de ce que nous sommes et de ce que nous devons à la Suisse ; cette amitié française qui ne cherche pas à nous détourner de notre patrie, mais nous demande, avant toute chose, de rester des Suisses. Un même amour de la liberté nous rapproche. Nous voyons dans la France la grande République qui a su réaliser, sur un vaste plan, une part de l’idéal qui nous est cher.

Nous sommes, tout près d’elle, un très petit pays, qui, en raison même de sa petitesse et de son morcellement, a réussi à faire une expérience plus longue de la liberté, dans ce cadre, plus définitif peut-être, de la fédération des cantons souverains. Nous la regardons avec l’entière confiance que, jamais, elle ne cherchera à annexer quoi que ce soit de nous-mêmes.

Cependant la France, tandis que l’Allemagne nous caressait pour nous exploiter, nous a trop souvent négligés. Il a fallu la guerre pour lui montrer, comme à nous-mêmes, le danger de laisser le champ libre à l’adversaire. Et il a fallu, la guerre pour apporter la preuve que d’infimes difficultés d’ordre administratif empêchaient un rapprochement nécessaire, qui est pour nous, comme pour la France, une défense, puisqu’une partie de la Suisse représente un bastion avancé de la culture française.

Ainsi nous savions bien, — mais on ne s’en avisait point en France, — que, pour un étudiant suisse, il n’était pas aisé de poursuivre dans une université française des études commencées en Suisse. Cet étudiant devait, afin d’obtenir l’immatriculation et de se présenter aux examens, payer le montant de tous les cours qu’il n’avait pas suivis en France depuis le début de ses études. Pour beaucoup de jeunes hommes, cette exigence était un obstacle insurmontable : ainsi les universités françaises leur étaient comme fermées automatiquement.

Le système en vigueur chez nous, de même qu’en Allemagne et à l’Université de Strasbourg, la division du temps d’études en « semestres, » donne aux étudiants une grande liberté. Tel professeur célèbre les attire-t-il dans une autre université ? Ils vont suivre ses cours pendant un ou deux semestres ou davantage. Et ces semestres leur sont comptés. Ils peuvent ainsi accumuler les bienfaits d’influences et d’enseignements divers.

Jusqu’à ce jour, il n’y avait donc que peu de contact entre les étudiants français et les étudiants suisses. On nous envoie,