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retrouver, est, avec le feu prince Ito et le regretté comte Hayasbi, l’homme d’Etat d’Extrême-Orient qui a le mieux connu et compris l’Europe et qui a, en toute circonstance, témoigné à la France la plus sincère et profonde sympathie, Lou-tcheng-sjang, qui avait accompagné le vice-roi Li-hong-tchang dans son ambassade extraordinaire en Europe on 1896, et qui, après avoir représenté la Chine aux deux conférences de la Haye on 1899 et 1907, fut ministre de Chine à la Haye et à Pétrograde, a, lui aussi, une connaissance approfondie de l’Europe : il possède complètement notre langue et peut être considéré comme l’un des Orientaux les plus familiers avec nos idées et sentiments.

Au Japon et à la Chine appartenait, dans les fondations et les œuvres de la paix à conclure, un rôle essentiel. Par leur situation territoriale, ils constituent à la Russie, sur sa frontière orientale, la même sécurité et garantie que lui offrira, sur sa frontière de l’Ouest, la Pologne enfin rendue à sa mission historique et s’étendant des Carpathes à la mer. Dans tout le bassin du Pacifique, la Chine et le Japon concourent, avec les États-Unis et les grandes Puissances maritimes, à rendre efficace la police des mers et à prévenir toute tentative que pourrait faire le pangermanisme pour ressusciter son rêve de domination. La Chine et le Japon seront de même de puissants auxiliaires des Alliés dans l’application et le maintien de la politique économique destinée à préserver le monde contre le retour des méthodes et des pratiques exécrables par lesquelles l’Allemagne de Guillaume II avait cru accaparer et asservir tout le globe.

La Chine et le Japon enfin ont leur place dans la Société des Nations qui, préparée par les conférences de la Haye, est apparue au sortir de la dernière guerre comme la nécessaire et durable conquête de la civilisation contre la barbarie. — Leur antique et haute culture, les doctrines confucianistes qui ont fait l’éducation de leurs peuples, les liens qui depuis un quart de siècle les ont si loyalement et solidement unis aux grandes Puissances dont, à l’heure critique, ils sont devenus les fidèles alliés, leur assurent dans cette société d’honneur et de salut le rang auquel ils ont droit et qu’ils tiendront avec autant d’attachement à la cause commune que de foi dans l’avenir. Ainsi que le disait le regretté Edouard Chavannes dans la dernière conférence qu’il fit en Sorbonne au mois de juin 1917 ;