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Le maréchal Teraoutsi ne restait pas sourd à ces cris significatifs et il ne s’obstinait pas à garder le pouvoir. Mais il désirait, après avoir assuré le maintien de l’ordre et après avoir achevé la mobilisation des troupes expédiées en Sibérie au secours des troupes tchéco-slovaques, préparer, conformément aux traditions et méthodes japonaises, la transmission du gouvernement dans les conditions les plus propres à ménager et garantir la sécurité de l’avenir. Depuis quelques semaines déjà il était en négociations à cet effet avec le prince Yamagata, président du collège des « genro » et chef du parti conservateur, ainsi qu’avec le marquis Saionji et M. Hara, chefs du parti constitutionnel (Seiyukai). — Peut-être le maréchal Teraoutsi et le collège des « genro » eussent-ils préféré désigner au choix de l’Empereur comme chef du futur gouvernement le marquis Saionji, qui avait été deux fois déjà président du Conseil, qui avait laissé le souvenir d’un esprit vraiment libéral en même temps que fidèle aux idéaux de la culture et de la conscience japonaises. Mais le marquis, devenu depuis sa retraite à la fin de 1912 une manière de « genro, » et peu ambitieux lui-même du pouvoir, ne paraissait nullement impatient de se charger à nouveau du fardeau des affaires. Et, d’autre part, le Parlement, les hommes politiques, l’opinion et une notable partie de la presse semblaient s’accorder à penser que l’heure était venue de tenter l’expérience d’un cabinet entièrement parlementaire et homogène, uniquement composé de membres des Chambres et présidé par celui qui, depuis 1913, était le chef du parti constitutionnel. M. Hara, qui siégeait à la Chambre basse depuis de longues années et qui, dès 1900, avait été l’un des lieutenants du prince Ito lors de la fondation du Seiyukai, était, par l’ancienneté des services et la disparition de ses aînés, le représentant le plus adéquat des principes et des tendances au nom desquels avait été mené le combat contre la bureaucratie et les clans.

Le 26 septembre, il était chargé de former le cabinet. Il n’appela à en faire partie que des membres du Parlement et de son propre parti, à l’exception des ministres de la Guerre et de la Marine, le général Tanaka et l’amiral Kato, qui, en raison des événements militaires et de l’expédition de Sibérie, furent maintenus à leurs postes. Le baron Takahshi, ministre des Finances, M. Tokonami, ministre de l’Intérieur, M. Noda,