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Au 21 mars, 124 de ces divisions suffisaient à tenir le front, les 80 autres restaient disponibles, et c’était un immense réservoir de forces. Au 11 juillet, la situation restait à peu près la même, — 126 divisions en ligne, 78 disponibles, — parce que l’Allemagne, jetant dans la fournaise au fur et à mesure de ses besoins les 450 000 soldats de sa plus jeune classe de recrutement, avait réussi, ou à peu près, à compenser ses pertes. Mais voici qu’à partir du mois d’août un phénomène, surprenant à première vue, se manifeste : la ligne de bataille, par suite du repli allemand, va toujours se raccourcissant, et pourtant, à mesure qu’elle se raccourcit, le nombre des divisions qui la tiennent, va toujours en augmentant : nous en identifions 156 en ligne au 1er septembre, puis 162 au 10 octobre, puis 167 au 16 octobre.

C’est que d’Ypres à l’Aisne et de l’Aisne à la Woëvre, le bélier de Foch frappe et refrappe ici, puis là, souvent à l’improviste. Au lieu des 80 divisions que l’Allemagne au 21 mars gardait orgueilleusement en réserve, elle n’en a plus que 48 disponibles le 1er septembre[1], 26 le 10 octobre, 20 le 16 octobre[2].

Or, si l’on additionne, à des dates quelconques. les divisions en secteur et les divisions disponibles, on ne retrouve plus, à partir de la fin d’août, le total de 204 : l’ennemi a été forcé d’en disloquer ou d’en dissoudre plusieurs[3]. De plus, dans celles qui subsistent, le nombre des combattants décroît, et leur qualité. Les adolescents de la classe 1919, engagés depuis avril, se sont épuisés très vite : à la fin de septembre, cette classe est consommée presque toute[4]. Pour combler

  1. Les 204 divisions allemandes se répartissaient ainsi au 1er septembre : groupe d’armées du prince royal de Bavière, 29 divisions : groupe d’armées von Bohn, 69 ; groupe d’armées du Kronprinz, 28 ; en Lorraine et en Alsace, 30, total : 156 divisions en ligne (ou en soutien immédiat), et 48 à l’arrière.
  2. Six seulement de ces vingt divisions peuvent être dites des « divisions fraîches, » car les autres ont été retirées des combats depuis moins de quinze jours.
  3. Au 1er septembre, huit divisions ont déjà été dissoutes (les 6e, 46e, 47e, 78e divisions de réserve, la 10e division de Landwehr, la 9e division de réserve bavaroise, la 10e division bavaroise, la 101e division). Au 15 septembre, trois de plus (la 33e division de réserve, la 211e division, la 235e division). Au 1er octobre, quatre autres encore (les 302e, 409e, 225e divisions et la 43e division de réserve). Dix autres au moins ont été dissoutes en octobre.
  4. En août, la proportion des hommes de la classe 1919 parmi les prisonniers est de 15 p. 100 à 20 p. 100.