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servir de gage à nos revendications : forêts, chemins de fer, mines de charbon et autres, forces hydrauliques, ports, docks, et voies de navigation intérieure, sans oublier les réserves en impositions ou monopoles fiscaux. Mais quand elle aura pourvu et la réparation des dommages de guerre dont elle s’est rendue coupable dans les pays envahis, — cette réparation doit être obtenue, et par priorité, jusqu’au dernier centime, — il est assez à craindre que, quelle que soit sa richesse restante, les Alliés ne réussissent en fin de compte à se faire verser, sur l’énorme total de leurs dépenses de guerre, qu’un dédommagement très insuffisant.

D’autre part, la France, qui dès le début a été le principal théâtre, le premier acteur et la grande victime de la guerre, est de toutes les grandes puissances de l’Entente la plus éprouvée dans ses forces vives ; c’est elle qui, de beaucoup, a le plus souffert. Elle a perdu, à proportion de sa population, deux fois plus d’hommes que l’Angleterre ; elle a dépensé pour la guerre, par rapport à sa richesse nationale, plus de moitié en plus ; ses plus riches province^ sont pour longtemps frappées de paralysie industrielle : la France s’est usée, économiquement, plus qu’aucune des grandes nations alliées. De cette primauté dans le sacrifice, les Alliés ne lui tiendront-ils pas compte, et ne voudront-ils pas développer l’Entente financière proclamée par M. Lloyd George, afin d’aider la France à panser ses plaies et à reprendre sa place, à égalité avec les autres nations, dans la vie du monde ? Ce serait de leur part une œuvre de justice. Emprunts interalliés, partage de charges ou mise en commun de ressources, les moyens ne manqueraient pas...

Quoi qu’il en soit, nous ne saurions oublier que nous avons une part notable de notre dette publique entre les mains de créanciers étrangers : cette dette « extérieure » devait atteindre à la fin de l’année l’Jl8 environ 28 milliards, dette à terme et dette flottante, à quoi il faut ajouter un peu plus de deux milliards souscrits par l’étranger à nos grands emprunts de consolidation. C’est là le point le plus sensible, pour ne pas dire critique, de notre situation financière. Intérêts à payer, capital à rembourser, c’est une grosse hypothèque qui grève notre actif et draine nos ressources, en un temps où la balance économique nous est défavorable. Il n’est pour nous qu’un moyen de remédier au mal : mettons tous nos efforts à développer, à