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Les vieux mots remplis de mesure,
Les vrais mots, reprennent leur sens ;
Belle louange sèche et verte,
Les soldats t’ont redécouverte,
Le Laurier remplace l’Encens.

Sobriété que l’on savoure !
Achille, à cet Ordre cité,
N’eût tenu que d’un mot : « Bravoure, »
Son brevet d’héroïcité.
Mais ce mot vaut une Iliade ;
Et lorsqu’un lanceur de grenade
Meurt debout sur les parapets :
« Bon soldat, » dit la prose altière,
Car l’adjectif, en temps de guerre.
Est plus calme qu’en temps de paix.

Dans ce langage, enfin avare
De tout ce qui semble éloquent,
« Superbe » est l’épithète rare,
« Magnifique » n’est pas fréquent.
Mais « beau » suffit ; on s’en contente.
Et sur une toile de tente
On s’endort satisfait pour peu
Qu’un chef qui vous vit à l’ouvrage
Ait dit simplement : « Beau courage, »
Ou bien : « Belle tenue au feu ! »

Le mot reluit et se retrempe.
« Dévoûment » semble refourbi.,
« Patience » est comme la lampe
Allumée au fond du gourbi.
« Champ d’honneur, » quel soleil sur l’herbe !
« Brillamment » redevient l’adverbe
Qui dit qu’un homme étincela ;
Chaque parole est sérieuse ;
Et quand on lit : « Mort glorieuse, »
On sait que la Gloire était là !