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bras ! » La foule émue aux larmes acclamait. Admirable spectacle : cet Hôtel de Ville drapé aux trois couleurs, centre de cette vie municipale où s’était réfugié l’esprit de la cité, la cathédrale où s’était entretenue, par le culte des morts, la ferveur française, le maréchal de la guerre de Trente Ans, bronze sacré qui, quarante-huit ans, mieux que ne l’eussent pu faire les grands tribuns, a parlé, de la France absente à Metz fidèle. Autour du drapeau du 319e, une sorte de garde d’honneur : toute la jeunesse lorraine, jeunes gens et jeunes filles, l’avenir de la province, tout entière maintenant à la France.

M. Victor Prevel est maire de Metz ; pour nous qui avons connu Metz avant 1914, c’est une de ces magnifiques revanches du droit qui donnent à ces heures d’Alsace et de Lorraine un caractère d’admirable philosophie et de haute moralité. Prevel, nous l’avons connu, champion intrépide de la France, se dépensant dans ce Metz envahi, se débattant dans les difficultés et parfois les périls pour conserver dans cet îlot français, battu par la mer germanique, l’esprit de notre pays ; nous avions donc appris avec douleur, mais sans étonnement qu’il avait été, dès la première heure, arrêté, incarcéré ; à peine sorti de sa cellule, il avait été porté à la mairie. C’est lui qui y reçoit le Président, qui le harangue, qui entend au nom de Metz l’admirable cri jaillissant du cœur de Poincaré. Et voici que, très grave, M. Georges Clemenceau, à son tour, s’avance ; il a entre les mains de grosses clés ; ce sont celles mêmes du Metz d’avant 1870 ; qu’est-ce à dire ? « En 1870, dit le président du Conseil, lorsque Metz tomba aux mains de l’Allemagne, le général de Lapassée put emporter les clés de la ville et les confia au sculpteur Vallès qui put ainsi les sauver jusqu’au grand jour de la délivrance. Ce jour est arrivé, je vous les confie. Je sais que vous ne les laisserez pas prendre. » Tout est miracle.

« Monsieur le Président, les membres du chapitre et moi, sommes extrêmement honorés de vous recevoir dans cette cathédrale. Vous avez pu vous rendre compte de l’amour que les Messins portent à la France. Soyez assuré que le clergé partage profondément ces sentiments. Si vous le voulez bien, nous allons nous rendre sur la tombe du grand patriote et du grand évêque que fut Mgr Dupont des Loges. » Cette fois, c’est à la cathédrale que le Président se présente ; à Metz, une fête des cœurs ne revêt qu’en ces lieux sacrés sa perfection. Le Président a voulu