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guerre, et les complications, souvent inextricables, qu’exigeait l’établissement d’une usine hydraulique, les négociations multipliées, les frais, les chances de procès, ont empêché bien des installations, qui, techniquement, semblaient séduisantes. Si la France entière trouve un avantage à ce que l’on consomme sa houille blanche plutôt que la noire, il ne faut cependant pas que, pour l’industriel, par le fait des charges et des impôts, la première coule plus cher que la seconde. Jusqu’ici, l’impuissance parlementaire à aboutir dans aucune œuvre utile et les prétentions socialistes à l’étatisme ont joué, pour les forces hydrauliques, le même rôle paralysant que pour la houille et pour le pétrole. On a cependant déposé, le 24 juillet 1917, un dernier projet de loi, qui, contestable sur quelques points, aurait le très grand avantage de substituer l’ordre au chaos. Le principe en est de soumettre au régime de la concession les usines à réaliser disposant de plus de 500 kilowatts et d’autoriser simplement les plus petites. La propriété des eaux courantes est, contrairement aux lois antérieures, retirée partout aux particuliers pour être attribuée au domaine public. Les usines concédées acquièrent un droit de servitude sur les propriétaires riverains contre payement d’une indemnité réglée par les tribunaux. Elles payent à l’Etat une taxe fixe et une redevance proportionnelle, et leurs installations reviennent à l’État au bout de soixante-quinze ans.

Si, comme on peut l’espérer, une loi de ce genre vient un jour faciliter la mise en valeur de cette richesse publique, on verra certainement l’aménagement de notre houille blanche atteindre vite le degré de croissance compatible avec les conditions industrielles de l’après-guerre. A quels chiffres atteindra-t-on ainsi et dans quelle mesure nos cours d’eau compenseront- ils notre pauvreté minière ? Peut-être n’est-il pas inutile de mettre sur ce point une sourdine à certains enthousiasmes excessifs, qui pourraient constituer un danger sérieux, s’ils amenaient l’opinion publique abusée à se montrer trop facile relativement au charbon dans nos négociations ou nos transactions avec l’Allemagne. Les estimations d’ensemble ont grandi, depuis dix ans, dans des proportions remarquables. Vers 1910, l’énergie disponible à l’étiage, pendant la période des basses eaux, était évaluée à 4 600 000 chevaux pour l’ensemble de la France. En 1911, la force disponible en eaux moyennes