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diverses marines de commerce et de guerre, il se soit produit, pendant les quatre ans qui ont précédé la guerre, un mouvement précipité vers la transformation du matériel par adoption des moteurs Diesel : d’abord en Allemagne, puis en France, enfin en Angleterre. Sans vouloir aucunement réagir contre cette tendance, il y a lieu de faire, à ce sujet, quelques observations générales qui s’appliquent avec un caractère particulier d’acuité à notre pays.

Quand on adopte les moteurs à combustibles liquides, il est un point à considérer d’abord, que l’on passe pourtant très habituellement sous silence : c’est la possibilité de se procurer ce combustible dans des conditions pratiques et avantageuses. En temps de paix et pour l’usage des particuliers, la question ne se posait guère. Le prix de l’essence pouvait monter légèrement ; on ne craignait aucune disette. La production de l’huile lourde, dont le moteur Diesel constitue l’application principale, grandissait d’année en année, et les industriels souriaient volontiers quand les géologues émettaient quelques doutes sur le temps pendant lequel l’humanité trouvera du pétrole dans la terre. Cependant, les réserves de ce corps sont très limitées et dans chaque champ pétrolifère, elles s’épuisent avec une vitesse extrême par suite de la facilité même avec laquelle l’opération s’opère et d’un gaspillage qui en fait perdre généralement, à l’extraction, au moins le quart, parfois les neuf dixièmes. Il n’y a guère de champ pétrolifère qui puisse compter sur un demi-siècle d’existence. Mais la terre est encore grande ; les régions inexplorées abondent ; les zones où l’on a chance de trouver du pétrole restent étendues ; des cas, comme celui du Mexique, où, en dix ans, on a atteint 6 750 000 tonnes (1916) sont de nature à entretenir toutes les illusions ; on peut également compter sur la distillation des schistes bitumineux qui abondent dans l’Ouest-Américain ou sur la production croissante des benzols dans l’industrie du coke ; et nous ne sommes plus dans une disposition d’esprit à nous préoccuper industriellement de ce qui pourra se passer au bout d’un siècle.

Il en est tout autrement si on envisage la question d’un point de vue national et, par conséquent, militaire. Le rôle militaire du pétrole, que je viens de rappeler, rend grave la situation dans laquelle peut se trouver un pays qui n’en possède pas sur son territoire. Or, l’absence du pétrole est, si l’on fait