Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 48.djvu/944

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en réaction contre la tendance trop exclusivement statique de cette science, ont voulu l’appliquer davantage à l’étude des phénomènes dynamiques.

Parmi ceux-ci, il n’en est point de plus suggestif dans la formation des tissus vivants que la cicatrisation qui nous fait assister à la reformation de chair et d’organes détruits.

C’est précisément de l’étude de la cicatrisation des plaies que Nageotte et Sencert ont tiré leurs belles découvertes.

Je m’excuse des développements au premier abord un peu techniques où je vais entrer à ce sujet. Mais il s’agit de phénomènes d’un puissant intérêt, et si grands dans leur petitesse qu’il est nécessaire de les bien comprendre pour en saisir toute l’importance ; car, dans la science, contrairement à ce qui se passe dans les contes de fées, la vraie beauté est surtout belle sans voile et l’émerveillement naît de la clarté.

Le tissu le plus important du corps humain par son volume est le tissu conjonctif qui sert, comme son nom l’indique, de charpente, de trame, de trait d’union aux divers éléments du corps et qui constitue la majeure partie de ce qu’on appelle communément la chair, les os, les cartilages. Ce tissu est constitué, lorsqu’on l’examine avec ce télescope de l’infiniment petit qu’est le microscope, par un abondant feutrage de fibres dont le diamètre varie de quelques millièmes à quelques centièmes de millimètre. Ce feutrage est recoupé par une quantité de fentes, lacunes, canaux et forme un vaste système spongieux. Dans ces mailles, imbibées d’une sérosité qui fait partie du « milieu intérieur » du corps humain et qui se renouvelle sans cesse, habitent des « cellules » souvent peu nombreuses qui sont les éléments du protoplasma vivant.

Il a été émis diverses théories pour expliquer la formation de ce feutrage intercellulaire qui occupe la plus grande partie des tissus conjonctifs.

Les uns pensaient que cette substance se forme par une sorte de sécrétion des cellules vivantes qui l’habitent, de même que les compartiments de la ruche aux dépens de l’abeille, d’autres que c’est aux dépens de la substance même de ces cellules, ou plutôt de leur partie externe, qu’on appelle l’exoplasme.

Or, en étudiant directement au microscope, et au moyen des méthodes classiques de différenciation et de coloration, l’évolution des cicatrices, M. Nageoire a été amené à cette conclusion que la substance fondamentale (c’est ainsi qu’il l’appelle d’un terme très