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Nord de la France : il est certain qu’elles auront acquis par là, pour la suite de la lutte, un avantage dont la guerre actuelle nous a démontré toute l’importance.

Dans toute guerre future, — c’est une des plus claires leçons de la guerre qui vient de s’achever, — la production industrielle et, en particulier, le rendement des industries extractives et de la fabrication de l’acier joueront, pour le développement de la campagne, un rôle décisif. Une part très importante de ces industries se trouve pour nous (et se trouvera encore dans l’avenir) concentrée dans le bassin houiller belge, dans le Nord de la France, dans la Lorraine. Que de fois n’a-t-il pas été dit et démontré, au cours de cette guerre, que l’Allemagne aurait dû, après quelques mois, abandonner la lutte, si elle n’avait disposé des minerais de fer du bassin lorrain ! Or, ce bassin d’Esch-sur-l’Alzette à Briey, notre future frontière le laisse presque sous le canon allemand. Il est exposé, en cas d’attaque brusquée, à toutes les surprises. Il risque, dans l’hypothèse la plus favorable, de voir son exploitation presque complètement paralysée.

Sous quelque angle qu’on se place, il nous semble impossible d’accepter que, dans le futur traité de paix, la frontière militaire de l’Allemagne soit tracée de Sierck à Wissembourg.

Nous ne demandons pas à annexer les pays de la rive gauche du Rhin, ce qui serait contraire à nos principes. Nous ne réclamons pas la formation d’un Etat-tampon, car cet Etat-tampon, de population allemande, ne constituerait pour nous, au point de vue militaire, qu’une illusoire zone de protection. Mais, tout en laissant subsister dans les pays de la rive gauche du Rhin l’administration et les institutions allemandes, il nous semble indispensable d’exiger que ces pays constituent, au point de vue militaire, une zone neutralisée ; qu’il ne puisse s’y trouver, en temps de paix, aucune garnison, aucune forteresse, aucune organisation défensive ou offensive allemande.

Cette neutralité doit nous être garantie de façon effective. Conformément au nouveau droit international dont nous prévoyons l’établissement, nous demandons que la neutralité de la rive gauche du Rhin soit placée sous le contrôle de la Société des Nations.

Pour l’exercice de ce contrôle, des troupes des différents États, membres de cette Société, devraient tenir garnison dans