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Les premiers jours du mois marquent la sollicitude du grand-père pour sa petite-fille Jeanne, atteinte d’une affection à l’œil. Sa guérison obtenue, elle a une réplique qui enchante le vieillard.


Je demande à Jeanne : Comment va ton œil ? Elle me répond : Je ne vais pas chez l’occulisse, parce qu’il va toujours de plus en mieux.


Puis ce sont, au courant des jours, des comptes, des placements, des retraits de fonds, des promenades notées, les voyages à Versailles pour le Sénat, des visites et des convives reçus, des amis perdus, des publications, des incidents de la vie de famille. Des « frappements nocturnes » reviennent souvent : je retiens le plus caractéristique :


Cette nuit, vers deux heures, frappement à ma porte, très fort et tellement prolongé que j’ai ouvert ma porte. Il n’y avait personne, et évidemment il y avait quelqu’un. Credo in Deum æternum et in an imam immortalem.

Le 26 février l’anniversaire du poète amène chez lui une grande foule avec laquelle fait contraste cette délicieuse scène intime : Dîner et soirée pour mon jour de naissance. Nos convives du dimanche plus Mme Foucher, Lesclide et Lockroy. Au dessert Jeanne s’est levée et a dit :

Moi la plus petite,
Je bois au plus grand.

Et elle a ajouté : Silence. — La parole… Papapa. Vive Victor Hugo !

13 mars. — Hier au soir, un médecin m’a amené Une jeune fille de vingt-deux ans atteinte d’une maladie inconnue. Elle n’a pas dormi depuis cinq ans. Pas une heure. Elle passe, son temps à lire mes livres et sait par cœur tout ce que fut écrit. Le docteur croit à mon influence sur elle et m’a prié de lui ordonner de dormir. Je l’ai fait.


Deux passades du carnet évoquent d’anciens et chers souvenirs.

27 avril. — Je suis allé à 11 heures chez Mlle Louise Bertin, quai de Conti, 15. J’ai revu le salon : le portrait du père,