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29 octobre.

Je vis dans un tourbillon. Je me demande s’il est bien vrai que j’administre la Comédie-Française. Jusqu’à présent l’impression que j’en ressens est bonne. Pour l’installation voir les journaux. Depuis, j’ai reçu ou rendu un certain nombre de visites. La question s’est posée entre Hamlet et Chamillac. Je voudrais jouer Meurice et Feuillet.


20 novembre 1885.

Je suis toujours envahi par les quémandeurs, les mangeurs de temps. Ceux qui ne font rien dévorent le temps de ceux qui travaillent ; mais ceux qui ne produisent rien vivent des aumônes de ceux qui produisent. Le parasitisme est la plaie commune.


13 février 1886.

Journées absorbées et qui passent, passent. Vie du journaliste : Une idée par jour. Du directeur : Un ennui par jour.


Lundi 16 août 1886.

Je vais tout à l’heure commencer les répétitions d’Hamlet. Au total, il est assez intéressant pour un lettré de vivre durant quelques semaines dans cette atmosphère de littérature et d’art. Je vais supposer que je me donne cette sensation, le plaisir de faire représenter du Shakspeare pour moi. Ce potentat-artiste de roi de Bavière n’eut pas d’autre volupté, et il est des hommes de ce temps, un de ceux qui, quoique fou, parce que fou peut-être, ont réalisé leur rêve. Jeune homme inconnu et pauvre, je ne me doutais pas, lorsque je payais une stalle au théâtre Beaumarchais pour y aller voir Rouvière interprétant Hamlet que je ferais jouer le drame par l’es premiers acteurs du monde. À tout prendre, mes ennuis qui sont réels, ont bien leurs bons côtés.


1er  septembre 1886.

Centenaire de Chevreul, hier, 31 août, par une journée torride. Toute la journée répété Hamlet. Got demande à Meurice, qui rechigne un peu, de le laisser agir seul. Monnet crie : « Nous allons à un fou ! » Maubant voudrait bien ne pas apparaître au premier tableau. Reichenberg voudrait n’être pas au lever du deuxième tableau, mais avoir son entrée.