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positions de tous les champs de mines, des tubes lance-torpilles et de toute autre obstruction dans les eaux turques seront indiquées et toute l’aide nécessaire sera apportée pour draguer ou enlever ces obstacles. — Communication sera donnée de toutes les informations au sujet des mines qui sont dans la Mer Noire. — Non seulement l’armée turque sera immédiatement démobilisée, et tous les bâtiments de guerre actuellement dans les eaux turques seront rendus, mais les Alliés auront le droit d’occuper tous les points stratégiques qui deviendraient utiles à leur sécurité; ils auront le libre usage de tous les ports et mouillages, de tous les moyens de réparations de ces ports et des arsenaux, le contrôle des stations de T. S.F. et des câbles, des chemins de fer, la disposition de tout le matériel naval, maritime et commercial, des facilités pour l’achat de charbon, huiles, etc.) Bref, avec les détroits qui se rouvrent, c’est la Mer Noire accessible, c’est l’isolement de la Roumanie rompu, c’est la Russie du Sud rapprochée, c’est le Danube à portée de nos atteintes et susceptible de devenir une de nos voies de pénétration, une de nos routes de manœuvre : ce sont d’immenses résultats et, pour nous, des avantages décisifs.

Sans la Bulgarie et sans la Turquie, l’Autriche-Hongrie demeurait sans ses deux béquilles, si on la compare à un corps vivant, et, si on la compare à un édifice, sans ses contreforts. Elle chancelait, et son inflexible armature, la tige de fer que l’Empire allemand lui avait plantée dans l’épine dorsale, ne suffisait pas à la maintenir droite, à lui interdire les mouvements ataxiques. En même temps que la Turquie ou avant elle, elle avait demandé l’armistice et la paix; la note austro-hongroise de M. Wilson, venant à la suite de tant d’autres invites ou intrigues, avait été comme le chant du cygne du comte Burian; étrange oiseau qui ne chante que pour mourir! On n’a pas oublié la réponse du Président: — Qui donc ai-je en face de moi? Depuis que je me suis occupé de vous en mon message du 8 janvier, d’autres sont nés dans l’Empire. Il y a une nation tchéco-slovaque. Il y a une nation yougoslave. Elles-mêmes parleront pour elles. — Le ton sec de cette espèce de congé n’a pas découragé le comte Jules Andrassy, appelé à la succession de son compatriote Burian, comme ministre impérial et royal d’une monarchie qui n’était déjà plus qu’une ombre, ou plutôt deux ombres séparées, ou plutôt un nombre, qu’on ne comptait plus, d’ombres diverses, de jour en jour multipliées.

Succession sans terre, usufruit d’un titre nu, ministère d’État sans État; mais le comte Andrassy a été toute sa vie un grand