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bien considérer par ailleurs que, sans le concours des marchés financiers de Paris, Londres et New-York, le crédit germanique est frappé de paralysie totale, on voit de quelles armes décisives disposent les Alliés.

Forts de ces constatations, qui leur promettaient de pouvoir causer utilement avec l’ennemi en tout état de cause, même si la « carte de guerre » ne venait pas à s’améliorer sous l’action des armées combattantes, les Alliés s’empressèrent d’accentuer leur politique économique. La France d’abord, puis l’Angleterre dénoncèrent tous leurs traités de commerce, pour n’être plus liées à l’égard de quiconque par la clause de la nation la plus favorisée. L’Angleterre décréta l’interdiction du commerce des métaux autres que le fer, pour la durée de la guerre et cinq ans après, à toute maison d’origine ennemie ou soumise à des influences ennemies ; pour les teintures industrielles, elle alla plus loin si possible en interdisant radicalement leur importation pour dix ans, le tout en vue de créer en Angleterre même les organes dont l’absence avait failli lui coûter cher au début des hostilités. La Grande-Bretagne, enfin, en s’assurant officiellement le contrôle des cotons d’Egypte et des laines d’Australie, promit spontanément à ses alliés de leur rétrocéder chaque année la part correspondante à leurs besoins.

Dans son message du 8 janvier, le président Wilson avait noté, comme l’un des fondements de la paix future, « la suppression autant que possible de toutes barrières économiques et l’établissement de l’égalité de commerce entre toutes les nations consentant à la paix et s’associant pour son maintien. » Puis, commentant ce message dans une lettre publique à l’évêque méthodiste Henderson, il avait ajouté : « La puissance allemande est une chose sans conscience ni honneur, indigne d’une paix basée sur les conventions, et elle doit être écrasée. » En quittant le ministère anglais du blocus pour entrer au Foreign Office, Lord Robert Cecil fit, dans une interview du 15 juillet, une sorte de synthèse de l’œuvre accomplie par lui : « Il n’est plus question, dit-il, de faire (comme en 1916) une étroite alliance défensive, mais de poser les fondements économiques de l’association des nations (association déjà en existence maintenant) envers qui nous sommes engagés… Si l’Allemagne abandonne les anciennes voies de sa politique économique comme préparation d’une guerre future, nous ne tarderons pas alors à