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que, la rupee étant désormais échangeable contre de l’or, la pièce d’argent qui porte ce nom n’est plus qu’une monnaie représentative de valeur (token money), et qu’il importe peu, dès lors, que la teneur en soit plus ou moins élevée. C’est un point délicat, dont la discussion exigerait l’examen approfondi du système indien tout entier. D’autre part, ajoutaient-ils, grâce à la hausse récente, le poids d’argent fin contenu dans la nouvelle pièce à teneur réduite aurait une valeur égale à celle qu’avait il y a quinze ans une quantité de métal supérieure de 50 pour 100 à celle que l’on conserverait dans la nouvelle rupee. Mais ils oublient de nous dire quelle en sera la valeur dans l’avenir.

Parmi les pays dont la monnaie se trouve avoir repris une valeur marchande très supérieure à celle que la loi lui assignait, on peut citer les Républiques de l’Amérique centrale. Chez plusieurs d’entre elles, le phénomène a fait éclore des programmes de transformation de leur régime monétaire. Elles profiteraient de la conjoncture actuelle pour passer de l’étalon d’argent à l’étalon d’or. À cet effet, elles réaliseraient leur stock de métal blanc et se procureraient, en, échange, du métal jaune, dont la quantité ainsi obtenue leur fournirait un nombre d’unités monétaires supérieur à celui qui était représenté par les pièces d’argent. Diverses difficultés ont empêché jusqu’ici la réalisation de ces idées, nées à la suite du déplacement de cours du métal blanc.

D’une façon générale, les monnaies d’argent des différents pays tendent à disparaître, en tant que signes monétaires, à partir du moment où la valeur marchande du métal dont elles sont faites dépasse la valeur nominale que leur attribue la loi de leur pays d’origine. Ce point se calcule d’après la teneur et le poids des espèces ; il s’élève en raison de l’usure déterminée par le frai, qui a pu diminuer, dans les limites de la tolérance légale, le titre des pièces, du coût de la fonte et de l’expédition du métal aux endroits où il peut être vendu.

En temps normal, il y avait peu de chances pour que cette hypothèse se réalisât. La circulation métallique de la plupart des pays paraissait plutôt saturée de pièces de métal blanc. La production mondiale avait suivi une marche ascensionnelle rapide : de 2 326 000 kilogrammes en 1880, elle avait, passé à 7 134 000 en 1912, c’est-à-dire qu’elle avait tripla. Pendant la