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Celles-ci portent sur l’abolition de l’article 9 de la constitution de 1871 qui prévoit qu’aucun membre du Reichstag ne peut faire partie du Conseil fédéral.

Il semblerait à première vue que la suppression de cette interdiction dût faire également disparaître la séparation entre l’exécutif et le législatif. Or, il n’en est rien.

Le Conseil fédéral n’est pas un parlement ; mais une représentation des princes. L’Empire allemand (nous sommes trop portés à l’oublier) n’est pas un pays unifié, mais une fédération d’États dont la souveraineté demeure, du moins en principe, presque complète et qui participent effectivement à l’exercice de la part de souveraineté qu’ils ont mise, s’il est permis de s’exprimer ainsi, en commun.

L’article 6 de la constitution de 1871 limite strictement les matières sur lesquelles l’Empire peut légiférer. Quand la nécessité d’un projet de loi général semble s’imposer, la puissance présidiale, c’est-à-dire la Prusse, en saisit, de sa propre initiative, ou sur la motion d’un des gouvernements confédérés, tous les autres États. Ceux-ci l’examinent individuellement, et les souverains « instruisent » ensuite leurs délégués au Bundesrath, en d’autres termes, leur donnent le mandat impératif de voter de telle ou telle matière.

Il n’y a pas, au Conseil fédéral, de délibérations pouvant modifier les votes individuels de ses membres. Ceux-ci sont tous liés d’avance par les instructions des princes qu’ils représentent. Par l’entremise de leurs plénipotentiaires, les chefs d’États gouvernent donc effectivement l’Empire. Le Conseil fédéral est une assemblée souveraine déléguée.

L’Empereur (primas inter pares) n’a aucun droit de veto. Dès qu’à la majorité des voix émises un projet de loi a été adopté par les membres du Bundesrath, l’Empereur est obligé de le promulguer sans délai. Comme roi de Prusse il dispose sans doute de 17 voix sur 58 et il lui est dès lors possible de s’opposer à toute modification de la Constitution, celle-ci devant être votée à une majorité des trois quarts des votants. En revanche pour toutes les autres lois d’empire les petits États peuvent, en se coalisant, mettre la Prusse en minorité. Ce sont donc les souverains des États qui, à proprement parler, forment le Conseil fédéral. Cela est tellement vrai qu’afin de prévenir toute surprise, tout manquement anonyme à la consigne imposée, les