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l’Assemblée et donné un passeport à la femme du traître Nadal, directeur de l’Arsenal de Strasbourg et émigré[1]. »

Aux divers griefs soulevés contre Dietrich, son défenseur Kerversau avait répondu qu’il n’avait eu qu’une conférence avec La Fayette à Phalsbourg, le 13 janvier 1792, au sujet des agissements révolutionnaires du club des Jacobins ; que les Strasbourgeois avaient eu le droit de protester contre les événements du 20 juin et que le maire avait usé de son droit en suspendant provisoirement les séances des clubs après le 10 Août et en faisant respecter la Constitution. Il le justifiait d’avoir envoyé « des adresses licencieuses aux Communes, » d’avoir abusé de ses pouvoirs, d’avoir favorisé l’émigration et les émigrés, et provoqué à la désobéissance envers l’Assemblée législative et ses commissaires. Il maintint que tout ce fatras d’accusations reposait sur des pièces tronquées, altérées ou supposées, sur des inculpations fausses, sur un tissu d’injustices et de méchancetés. Il se plaignait qu’on eût surpris la bonne foi de la Convention en lui arrachant le décret relatif au transfert de Dietrich dans la prison de Besançon et à l’enlèvement de cet inculpé à ses juges naturels. Un citoyen Lévrier avait écrit, le 30 décembre, à la Société populaire de Strasbourg : « Je vous ai dit dans ma dernière que je demanderais que le sieur Dietrich fût transféré par devant le tribunal de Besançon par préférence à celui de Paris, parce que l’influence des ministres, ses protecteurs, et celle de quantité de députés qui le soutiennent serait ici très dangereuse. Salut à tous nos braves Jacobins et Jacobines[2] ! »

Le citoyen Favarelle s’était vanté de son côté d’avoir saisi l’argent de Dietrich en ces termes « Je f… tout cela sous scellés et je vais rendre compte de mon expédition. » Enfin Lévrier ajoutait qu’il avait obtenu les poursuites nouvelles contre Dietrich en se servant de l’influence de l’évêque de Valence, un apostat, son ancien camarade, qui avait empêché que le décret fût discuté, ainsi que le demandaient les partisans du maire. « Sa pipe est cassée pour la seconde fois, et il faut qu’il parte pour Besançon pour y être jugé et recevoir la récompense de ses forfaits[3]. »

  1. Acte d’accusation lu à la Convention par Rühl le 20 novembre 1792.
  2. Archives Nationales. — Saint-Just lut le 22 décembre 1792 à la Convention une adresse de citoyens de Strasbourg qui demandaient qu’on n’envoyât pas à cette ville un homme qui y trouverait des partisans et des complices.
  3. Archives Nationales.