Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 46.djvu/488

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

austro-serbe au Tribunal de la Haye. Le gouvernement impérial allemand a, il est vrai, négligé de faire figurer ce télégramme trop significatif à son Livre Blanc… Ainsi s’écroulent l’un après l’autre, l’un sur l’autre, les mensonges de l’Allemagne. L’accumulation même de ses fourberies démontre assez le prix qu’elle met à tromper l’opinion universelle.

Elle a raison. Question capitale en effet qui doit toujours être présente à nos esprits, que celle de l’origine de la guerre. S’il est exact, comme il l’est, qu’un gouvernement et un peuple aient déchaîné sur le monde le fléau dont il est dévoré, qui doutera que la paix ne peut être réellement établie que le jour où ce peuple et ce gouvernement criminels auront été mis dans l’impuissance de renouveler leur forfait ?


Ainsi la connaissance des origines de la guerre dicte sa conclusion nécessaire.

Depuis quatre ans, on a souvent, et d’autant plus souvent qu’on s’éloignait davantage du début des hostilités, posé ce point d’interrogation : quels sont nos buts de guerre ? — Rectifions avant tout une terminologie impropre. Que l’Allemagne, qui a voulu et déclaré la guerre, se propose des buts de guerre, d’accord. L’Entente, qui l’a subie, ne connaît que des conditions de paix. — Quelles sont donc les conditions de paix qu’elle serait disposée à accepter ?

Notons qu’elle n’a pas eu jusqu’ici à en refuser. Des esprits inquiets se sont parfois demandé si les gouvernements de l’Entente n’auraient pas laissé d’aventure échapper le rameau d’olivier qui leur aurait été tendu. De récents événements ont dû apporter quelque apaisement à leur souci. L’Allemagne a montré avec éclat, par deux fois, coup sur coup, ce qu’elle cache sous le nom de paix. La paix de Brest-Litovsk en premier lieu : Ubi servitudinem faciunt, pacem appellant. Et la paix de Bucarest a, j’imagine, achevé de convaincre ceux que l’expérience précédente n’aurait pas encore éclairés.

En présence de tels actes, quelle imagination serait assez folle pour rêver que le militarisme prussien ait pu jamais concevoir la pensée de se condamner lui-même, de se suicider, en offrant à la France la restitution de l’Alsace-Lorraine, symbole vivant de sa puissance ? Il est d’ailleurs d’autres Alsaces-Lorraines. Quand l’Italie est entrée en guerre, n’est-ce