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régime normal de pression de tir supérieure aux deux tiers de la pression de sécurité admise.

Mais admettons les chiffres précédents qui sont d’ailleurs confirmés par différents calculs, qu’on peut faire à cet égard sur des exemples précis.

Il en résulte nettement que le métal, les conditions du tir et les résistances étant les mêmes, le poids d’un canon fretté ordinaire l’emporte de 50 à 60 p. 100 sur celui du canon à fil. Ou, si l’on préfère comparer le rendement en force vive par kilogramme de la bouche à feu, on trouve naturellement les mêmes rapports.

En somme, 150 tonnes de canons frettés ordinaires peuvent être remplacées à puissance égale par 100 tonnes de canons à fil. — Chose curieuse, ce chiffre aujourd’hui expérimentalement établi est très exactement celui que, d’après ses prévisions théoriques, Moch indiquait, il y a 25 ans. (Vue générale de l’artillerie actuelle, p. 54.)

Il y a autre chose encore à en déduire, par ces temps de matières premières coûteuses et de tonnage rare : c’est que, pour un même résultat que les outillages existants permettent de réaliser facilement et vite, il est moins coûteux et moins difficile d’acheter et de transporter 100 tonnes d’acier que 150. Encore n’ai-je pas tenu compte ici du fait que, dans le canon en fil, aucune parcelle de métal n’est perdue, tandis que dans la fabrication des canons en tubes une grande partie des lingots tombe comme déchets et ne peut être récupérée qu’en partie et après remise au four.

Pour augmenter beaucoup le rendement de notre artillerie, pour la munir de canons aussi puissants et plus légers, ou de même poids et beaucoup plus puissants, il nous suffira d’entrer dans cette voie si brillamment parcourue par nos Alliés britanniques et qui est une voie française, comme Suez, comme Panama… comme tant d’autres chemins tracés dans la matière ou dans l’esprit.

De tout cela je ne veux pas tirer la conclusion ; car elle, se dégage d’elle-même, impérieuse.


CnARLES NORDMAiNN.