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vicissitudes, la liaison sans cesse rompue avec nos Alliés était, — en un de bataille, — assurée.

Bien mieux, en posant, cette fois d’une façon singulièrement aiguë, la question de l’unité de commandement et de l’interpénétration des troupes alliées, la bataille l’avait soudain, au grand bénéfice de l’Entente, résolue. Réunis à Doulleus, le 26 mars, les représentants les plus liants dus gouvernements et états-majors alliés avaient décidé que la mission de coordonner leurs efforts serait confiée au général Foch dont l’activité allait se faire sentir de si heureuse façon que, quelques jours après, il recevait enfin, avec le titre de général en chef des armées alliées en France, le commandement du front. Sans doute, n’avait-il pour l’heure qu’à homologuer des mesures qui, dès le 30, obtenaient de si beaux résultats. Mais ce qui restait, c’est que, inappréciable nouveauté, l’unité de front avec l’unité de commandement était enfin réalisée.

Ainsi se terminait au singulier avantage des Alliés la première phase de cette bataille de France dont les Allemands avaient, avec tant de foi, attendu l’écrasement de l’Entente et la fin de la guerre.

« Les cloches de Pâques sonneront la paix, » avait dit le kronprinz Frédéric-Guillaume à ses soldats. Mais dès le 29, un grand chef avait dit devant moi : « Je crois que nous chanterons l’Alléluia le jour de Pâques. » Les cloches de Pâques sonnaient le 31 mars non la paix allemande, mais la victoire de l’intervention française sur ce champ de bataille où les armées alliées semblaient devoir succomber sous le double coup du nombre et de la surprise, — parce que, pas un instant, on n’avait désespéré de regagner la partie et estimé trop bas, chez les chefs, la valeur du soldat de France.

Cette valeur allait se déployer dans les mois suivants au cours des furieuses attaques que l’ennemi, des Flandres à l’Aisne et derechef sur la région de l’Oise, multipliera sur notre front. Et toujours elle finira par opposer au flot allemand débordant une résistance qui fera que, pas plus que les croches de Pâques, les cloches de la Pentecôte ne sonneront la paix allemande.