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par expérience, que, touchée au corps et à la tête, elle essaie ou elle essaiera de projeter ses tentacules de tous côtés.

Nous le savons; mais à ses efforts dispersés, à ses mouvemens qui ressembleront de plus en plus à des spasmes, nous opposons un bloc de plus en plus compact, de plus en plus dense, de plus en plus homogène. Nombre de faits récens ont concouru à augmenter la solidité de l’Entente, à multiplier ses facultés de résistance, par ce qui, en dépit de l’arithmétique, multiplie le plus politiquement et militairement, par l’unité. A la conférence d’Abbeville, « M. Orlando a officiellement accepté, au nom de l’Italie, que le commandement en chef des armées alliées en France soit confié au général Foch. » De telle sorte qu’il n’y a plus en France, sous un chef unique, qui est Français, mais qui est le généralissime commun, qu’une armée unique, composée d’élémens français, anglais, portugais, américains et italiens, eux-mêmes amalgamés, fondus en une chair commune, dans un commun esprit. Entre les peuples alliés, les malentendus qui pouvaient contenir des germes de dissension, peut-être de conflit, se dissipent : le Congrès où se sont rencontrés à Rome les délégués de plusieurs des nationalités opprimées par l’Autriche a heureusement acheminé vers la conciliation les anciennes intransigeances, en sens contraire, des Italiens et des Yougo-Slaves. Sans doute, pour ne rien dissimuler, il y a, en Grande-Bretagne, on ne dira pas le point noir, mais le point vif ou le point névralgique de l’Irlande. L’île-sœur, sous des influences, où il est regrettable d’en voir se mêler à de moins pures quelques-unes qu’on est accoutumé à respecter, soulève contre la conscription obligatoire une opposition active et quasi révolutionnaire. Cependant la plaie ne semble pas s’être envenimée, et de sages mesures, prises à temps, suffiront peut-être à ramener l’apaisement, à amener le consentement. La résolution des Alliés s’affirme très haut et très clair, dans les discours des hommes d’État et des chefs de partis, par les paroles de M. Lloyd George, de lord Robert Cecil, de M. Daniels, ministre américain de la Marine, de M. Compers, président de la « Fédération des travaillistes américains. » Le changement qui s’est produit dans le Cabinet japonais, le remplacement par M. le baron Goto de M. le vicomte Motono, pour cause de maladie, n’ébranle nullement l’Entente, même en ses plus lointaines assises ; au minimum, la coopération du Japon reste et restera ce qu’elle était: mais les empiétemens de l’Allemagne en Russie, au mépris du traité de Brest-Litovsk, tant de provocations impudentes, tant de périls à l’horizon, devraient et probablement pourront, sous